Portrait Julie Roset, de la musique ancienne à Operalia...
Portrait

Julie Roset, de la musique ancienne à Operalia

27/03/2024
Julie Roset. © David Noles

Auréolée de son Premier prix au Concours « Operalia », en novembre dernier, la soprano française débutera, le 10 avril, à l’Opéra National de Paris, dans Médée de Marc-Antoine Charpentier. Avant de retrouver le Festival d’Aix-en-Provence, pour la création, le 4 juillet, de Samson, « tragédie lyrique » perdue de Rameau, réinventée par Raphaël Pichon et Claus Guth.

Du plus loin qu’elle s’en souvienne, Julie Roset a toujours voulu faire du chant. Fillette, elle reproduisait les mélodies qu’elle entendait, pour le plus grand ravissement de son auditoire. Elle rejoint donc, naturellement, la Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon, dès 6 ans. Et la magie opère – forcément, puisqu’elle participe aux productions de la maison provençale, Carmen, Orphée aux Enfers, La Bohème, etc. Mais lorsqu’elle manifeste le souhait de prendre des cours de technique vocale, on lui explique qu’elle doit attendre d’avoir 15 ans.

Elle se tourne, alors, vers l’instrument et, après avoir testé le piano, le hautbois, et dû renoncer à la harpe, trop encombrante, c’est sur la flûte traversière que se porte son choix. Elle l’étudie pendant six ans, avec un professeur, également chef d’orchestre, qui lui apprend à respirer. Pour la flûte, mais aussi pour le chant.

Explorer la musique ancienne

À 9 ans, elle intègre le chœur A Piacere, dont la directrice, Annie Fajeau, la prend sous son aile, lui confiant, progressivement, de plus en plus de solos. Julie Roset y restera près d’une décennie, en parallèle du Conservatoire d’Avignon, dans la classe de Valérie Marestin, et d’une scolarité en horaires aménagés, au collège, puis au lycée.

Adolescente, elle fonde son premier ensemble de musique baroque, La Mascarade, avec deux amis, claviériste et violoncelliste. Cette inclination pour le répertoire ancien se trouve confirmée, lors de week-ends dédiés à ce style, au Conservatoire d’Aix-en-Provence, durant lesquels elle aborde la danse, la musique de chambre et la direction d’orchestre baroque, tout en suivant l’enseignement de Monique Zanetti, en chant.

Julie Roset souhaite, alors, aller plus loin dans son exploration et part, à 19 ans, étudier à la HEM de Genève, où elle apprend tout de la lecture des neumes, des annotations, de l’ornementation, du contrepoint, etc. Elle aime tant cette ville, qu’elle décide d’y rester toute une année, après l’obtention de son bachelor, continuant à beaucoup travailler avec l’un des professeurs de la HEM, Leonardo Garcia Alarcon, qui lui a déjà fait enregistrer son premier disque, dans lequel elle partage un duo avec Mariana Flores (Monteverdi : Lettera amorosa, CD Ricercar).

Direction New York

Après cette période exclusivement consacrée au baroque, Julie Roset souhaite se former, afin de revenir au répertoire classique. Lors d’une audition pour participer à l’Académie d’Aix-en-Provence, durant le Festival, elle rencontre Edith Wiens, qui lui propose de venir travailler à la Juilliard School, où elle est enseignante. Julie réussit le concours d’entrée de la célèbre école, au sein de laquelle elle doit intégrer le programme « Artist Diploma in Opera Studies », un cursus destiné aux jeunes musiciens, à une étape préprofessionnelle de leur carrière.

Les cours débutant en septembre 2020, elle est obligée de les suivre en visioconférence, avant de pouvoir se rendre à New York, début 2021. Les premières semaines sur place sont difficiles et solitaires, mais après quelque temps, Julie Roset peut, enfin, côtoyer les autres chanteurs et profiter des cours en présentiel. Elle fait, à la Juilliard, un travail de fond sur sa voix et considère ces deux années, passées dans l’institution, comme les meilleures de sa vie.

L’amour du répertoire français

À l’issue de celles-ci – durant lesquelles elle a, également, remporté le Concours « Laffont » (Laffont Competition) du Metropolitan Opera –, Julie Roset décide de prolonger son séjour américain, jusqu’en mai 2024. Cela ne l’empêche pas de revenir régulièrement en Europe, pour voir ses proches, mais aussi faire des concerts, notamment avec Leonardo Garcia Alarcon.

Si elle reste fidèle au chef argentin, elle souhaite décoller son étiquette de « baroqueuse », rappelant qu’elle a gagné son premier concours, à 19 ans, avec l’air « des clochettes » (Lakmé). Page qui lui a, également, permis de briller, lors de la finale du dernier Concours « Operalia », dont elle remporte le Premier prix « Femmes », à l’automne 2023.

La soprano dit adorer le répertoire français et rêve d’interpréter Olympia (Les Contes d’Hoffmann), la Fée (Cendrillon), Dinorah (Le Pardon de Ploërmel), Ophélie (Hamlet), Marie (La Fille du régiment), etc. Elle cite, aussi, les Strauss – Johann et Richard –, avec Adele (Die Fledermaus) et Sophie (Der Rosenkavalier), sans oublier, chez Mozart, Pamina (Die Zauberflöte) et Despina (Cosi fan tutte).

Le spectre est donc large pour sa tessiture légère, qu’elle souhaite ­asseoir davantage dans le médium. Et ses rêves de répertoire classique ne lui font pas délaisser le baroque, qu’elle continue à honorer, entre autres, dans Médée de Marc-Antoine Charpentier, où elle incarnera l’Amour, sous la baguette de William Christie, au Palais Garnier, mais aussi avec l’ensemble La Néréide, qu’elle a créé avec deux collègues et amies, Camille Allérat et Ana Vieira Leite.

Les trois sopranos explorent, actuellement, les madrigaux de Luzzasco Luzzaschi et, après un disque sorti en septembre 2023 (Luzzaschi : Il ­concerto segreto, CD Ricercar), elles présenteront ce programme, le 2 mai prochain, en avant-première du Festival de Saint-Denis, à l’Église Saint-Denys-de-l’Estrée.

À 27 ans, Julie Roset ne manque donc, ni de projets, ni d’envies.

KATIA CHOQUER

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