Concerts et récitals Thaïs au pied levé à Toulon
Concerts et récitals

Thaïs au pied levé à Toulon

02/02/2024
Jean-Fernand Setti (Palémon) et Josef Wagner (Athanaël). © Frédéric Stéphan

Palais Neptune, 25 janvier

La raison première, sinon unique, de la programmation de Thaïs, en version de concert, par l’Opéra de Toulon – au Palais Neptune, l’un des différents lieux d’accueil de ses saisons « hors les murs », durant la durée des travaux de rénovation du bâtiment historique –, était, sans nul doute, la prise du rôle-titre par Amina Edris, dont la conquête d’héroïnes d’opéras français, aussi dissemblables qu’Alice dans Robert le Diable et Ariane, de Massenet, déjà, a été saluée avec transport dans Opéra Magazine. Et elle a bien eu lieu, le 23 janvier.

Souffrante, selon le terme consacré, la soprano égyptienne a, cependant, préféré renoncer à la seconde des deux soirées prévues. Chloé Chaume, qui avait déjà incarné l’hétaïre, avec succès, à l’Opéra de Tours, sous la direction éminente de Michel Plasson, en janvier 2022 (voir O. M. n° 180 p. 56 de mars), prend donc le relais.

Le défi est immense, de chanter une partie aussi exigeante au pied levé. Et si elle ne le réussit qu’à demi, la soprano française mérite, assurément, toutes les circonstances atténuantes – d’autant que des témoignages plus probants de son interprétation sont disponibles sur internet.

Outre qu’elle apparaît gênée, dans ses déplacements, par une robe un rien trop longue, son instrument manque, ici, d’assise, non seulement dans le grave et le médium, mais aussi dans l’aigu, dur et voilé par un souffle d’air – jusqu’à ce qu’il vienne à manquer, dans la scène finale. Ses intentions n’en sont pas moins justes, ses accents, sincères, et le portrait qu’elle dessine de Thaïs, attachant.

À ses côtés – ou plutôt à la distance imposée, dans cette stricte disposition de concert, par l’estrade du chef, qui les sépare, la majeure partie du temps –, Josef Wagner, inattendu dans ce répertoire, même s’il avait déjà abordé Athanaël, au Theater an der Wien, en janvier 2021, dans une version abrégée de temps de Covid, parue en DVD (voir O. M. n° 178 p. 94 de décembre-janvier 2021-2022), fait un cénobite monolithique. Et, dès lors, aussi perméable à la passion que Jochanaan (Salome).

Surtout qu’il est difficile de ne pas entendre ce dernier, dans le hiératisme du timbre, comme de l’émission du baryton-basse autrichien, d’ailleurs un peu contrainte et enrouée, sur les hauteurs. Et ce, en dépit d’une diction française manifestement très travaillée, à défaut d’être toujours intelligible.

Clair et brillant, ainsi qu’il sied à Nicias, le ténor de Matthew Cairns n’en est pas moins nasal, tandis que Jean-Fernand Setti contredit, en Palémon, son allure de colosse, par la douceur réitérée dont il enveloppe « Ne nous mêlons jamais, mon fils, aux gens du siècle ». Quant à Faustine de Monès et Anne-Sophie Vincent, elle gazouillent à ravir les gloussements de Crobyle et Myrtale – la seconde se chargeant, aussi, honorablement, d’Albine.

Dans la fosse, avec la part de concentration dévolue à l’aspect visuel d’une production scénique, l’Orchestre de l’Opéra de Toulon aurait, peut-être, fait meilleure figure. Mis à nu sur le plateau – a fortiori de l’auditorium banalement fonctionnel d’un palais des congrès –, il ne parvient pas, sous la conduite, soignée, mais non sans raideur, de son directeur musical fraîchement nommé, Victorien Vanoosten, à stimuler l’imagination. Tout particulièrement dans les ballets qui, dès lors, tournent à vide.

MEHDI MAHDAVI

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