Interview Estelle Danvers, faire danser l’opérette...
Interview

Estelle Danvers, faire danser l’opérette à Aix-les-Bains

05/07/2023
© Marion Bonnet

Présente au Festival de l’Opérette depuis près d’un quart de siècle, la danseuse et chorégraphe française en a pris la direction, en septembre dernier. Au programme de la 33e édition de la manifestation, rebaptisée Festival Lyrique, La Belle Hélène d’Offenbach, le 22 juillet, dans une mise en scène de Jean-François Vinciguerra, mais pas seulement.

Pourquoi un festival dédié à l’opérette – puisque c’était ainsi que sa première dénomination le définissait depuis l’origine ?

Le regretté Pierre Sybil a lancé le Festival, en 1989, avec l’opérette L’Auberge du Cheval-Blanc, en coopération avec le maire d’Aix-les-Bains de l’époque. La municipalité était déjà très impliquée, comme c’est encore le cas, aujourd’hui, avec Renaud Beretti et son adjointe aux Affaires culturelles, Isabelle Moreaux-Jouannet. C’était une ville thermale dotée d’une très belle salle, le Théâtre du Casino Grand Cercle, avec un public de curistes tout trouvé – même si nos spectateurs viennent, à présent, d’un horizon beaucoup plus large. Proposer une saison d’opérette, à Aix-les-Bains, leur est donc apparu comme une évidence.

Vous qui êtes danseuse et chorégraphe, quelle est votre histoire avec ce festival lyrique ?

Dès le début, la danse a occupé une place très importante dans le Festival : Pierre tenait beaucoup à intégrer du ballet à ses spectacles. J’ai donc commencé en tant que danseuse, en 1999, et je n’ai plus quitté le navire ! Douze ans plus tard, je suis devenue la chorégraphe de l’événement, puis Pierre est décédé juste avant la pandémie. Les années Covid ont été très compliquées, et je ne suis arrivée à la tête du Festival qu’en septembre dernier. Sous ma direction, la danse va, bien sûr, garder toute son importance, mais je tiens aussi à rester à l’écoute des différents metteurs en scène : certains y sont très sensibles, d’autres pas, c’est ainsi ! Pour ma part, j’aime quand le ballet se fond dans l’histoire. Ou alors quand il apporte quelque chose de décalé, d’humoristique.


Le Théâtre du Casino Grand Cercle. © Pauline Marizy

Quelles sont les nouveautés de cette édition, consacrée à Offenbach ?

Quand nous sommes arrivés, nous avons estimé, avec les membres de mon équipe, qu’il était temps d’apporter au Festival une nouvelle inspiration – sans rien oublier de ce qu’il proposait jusqu’à présent. Nous voulions, notamment, pouvoir présenter aussi des spectacles un peu différents. Nous avons donc décidé de rebaptiser l’événement Festival Lyrique. C’est la formule que nous inaugurons, cette année, sous le marrainage d’Ève Ruggieri, que je suis très honorée de recevoir à Aix-les-Bains. Je tenais, également, à construire une véritable vie de festival en dehors des concerts. Ève proposera donc une conférence sur la cantatrice Hortense Schneider, créatrice de nombre de grands rôles d’Offenbach, le baryton-basse et metteur en scène Jean-François Vinciguerra emploiera sa verve légendaire pour évoquer le compositeur Hervé, qui a fait découvrir Offenbach, et enfin, un concert narratif mettra en avant un autre aspect de la vie de ce grand nom de l’opérette : sa carrière de violoncelliste. Je souhaite vraiment que ce festival ne soit plus seulement un enchaînement de productions. En effet, même si nous n’en présentons qu’une seule, cette année, il y en aura deux, à l’avenir – chacune avec un chef et un metteur en scène différents –, et ensuite, peut-être même trois !

Parlons justement de la production de cette année : La Belle Hélène

Nous reprenons la mise en scène que Jean-François Vinciguerra avait conçue, en 2010, pour le Festival de Lacoste, mais nous allons y intégrer un ballet, dont je vais réaliser la chorégraphie : ce sera donc une création commune. Le chef Bruno Conti, grand habitué du Festival et de son Orchestre (qui est constitué de professeurs des Conservatoires de la région), travaillera à partir de l’édition critique de Jean-Christophe Keck – nous y tenions beaucoup, pour la précision de la partition. La « Berceuse » de Pâris, qui a longtemps été systématiquement coupée, retrouvera donc sa place, ce qui rend la dramaturgie beaucoup plus logique. Sur scène, nous accueillerons des solistes de renom, comme la mezzo-soprano française Valentine Lemercier et le ténor malgache Blaise Rantoanina.

Le 10 juin (1), vous aurez présenté Princesse Czardas, avec l’Orchestre et le Chœur du Festival, dans le cadre de la 10e édition des Theatre Olympics, qui a lieu à Budapest…

Princesse Czardas était à l’affiche du Festival, l’été dernier, et le Budapest Operetta Theatre recherchait des productions de ce titre issues de plusieurs pays, afin que celui-ci soit présenté dans différentes langues. Les organisateurs m’ont donc contactée, et nous avons accepté avec joie. À l’avenir, j’aimerais beaucoup que nous ayons, chaque année, une production en ­dehors du Festival. Et puis, j’ai un autre projet, que je chuchote, car rien n’est encore fait, ni décidé : une petite saison d’hiver…

(1) L’entretien a été réalisé le 24 mai 2023.

Propos recueillis par ROXANE BORDE

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