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Janine Micheau

26/02/2015

L’élégante soprano française, disparue en 1976, aurait eu 100 ans, le 17 avril dernier. Encore davantage que pour sa riche carrière à l’Opéra-Comique, au Palais Garnier et sur les plus grandes scènes internationales, Janine Micheau est connue pour ses nombreux enregistrements, dont beaucoup figurent dans toutes les discothèques depuis plus d’un demi-siècle.

100_anniversaire_-_Jeanine_Micheau«Janine Micheau, entre l’ange et l’oiseau. » Ainsi s’intitulait l’article publié par Pierre-Petit, en octobre 1976, dans les colonnes du Figaro, à l’annonce de la disparition, à l’âge de 62 ans, au terme d’une longue et douloureuse maladie, de la cantatrice. Sa magnifique voix de soprano lyrique colorature lui avait ouvert les portes des plus importantes maisons d’opéra et, contrairement à la plupart de ses consœurs françaises du temps, sa carrière avait indéniablement été internationale. Musicienne accomplie, femme de caractère un rien distante, voire froide en scène, grande interprète de la musique de son temps, Janine Micheau nous a légué une discographie particulièrement représentative des différents aspects de son art.

FIDÈLE À LA SALLE FAVART
Janine Micheau est née à Toulouse, le 17 avril 1914. Elle effectue ses études musicales au Conservatoire de sa ville natale, puis à celui de Paris. Couronnée par ses Premiers prix, elle débute à l’Opéra-Comique, en novembre 1933, dans un tout petit rôle : la Plieuse dans Louise de Gustave Charpentier. Mais, très vite, elle accède aux premiers : Chérubin (Les Noces de Figaro, en 1935), Rosine (Le Barbier de Séville), Micaëla (Carmen), Aline (Le Chemineau de Xavier Leroux, reprise de 1936, avec Louis Musy dans le rôle-titre), Olympia (Les Contes d’Hoffmann), Leïla (Les Pêcheurs de perles), Lakmé, Mireille, Mélisande (Pelléas et Mélisande, en 1946), Sophie (Werther), Nanette (Falstaff)…
Janine Micheau restera fidèle à la Salle Favart, même au plus fort de sa carrière internationale. Elle y participe à deux créations lyriques majeures. D’abord, la première in loco d’Ariane à Naxos de Richard Strauss (version française de Paul Spaak), le 30 avril 1943, dans une mise en scène de Jean Mercier et sous la baguette de Roger Désormière : autour de la légendaire Ariane de Germaine Lubin, Georges Jouatte en Bacchus… et Janine Micheau en Zerbinette ; elle reprendra le rôle, sept ans plus tard, cette fois avec Georges Sebastian au pupitre. Mais c’est la création parisienne – et en français, dans la version d’André de Badet – du Libertin (The Rake’s Progress) d’Igor Stravinsky, le 18 juin 1953, qui offre assurément à Janine Micheau l’une de ses plus belles incarnations : Anne Trulove, auprès de Léopold Simoneau (Tom Rakewell), Xavier Depraz (Nick Shadow) et Simone Couderc (Baba-la-Turque), sous la direction d’André Cluytens.

UNE VOIX POUR MIHAUD
Janine Micheau débute au Palais Garnier dans le rôle de Creuse, lors de la première française de Médée, le nouvel opéra de Darius Milhaud (créé l’année précédente, à Anvers, dans une traduction flamande). Nous sommes le 8 mai 1940, très peu de jours avant l’invasion de la France par les troupes allemandes. Jacques Rouché a réuni une équipe prestigieuse : Charles Dullin pour la mise en scène, Serge Lifar pour la chorégraphie, Marisa Ferrer incarnant Médée et José de Trévi, Jason. La prestation de Janine Micheau ne recueille que des éloges : « Pour ses débuts [au Palais Garnier], elle a prêté à Creuse sa voix si pure, si limpide et d’une tenue si sûre dans l’aigu », écrit le journaliste et musicologue Henri de Curzon, éminent connaisseur des voix. À la demande du compositeur, elle devient la Manuela de son ambitieux Bolivar, opéra d’après Jules Supervielle sur un livret de Madeleine Milhaud, créé au Palais Garnier, le 12 mai 1950, avec Roger Bourdin dans le rôle-titre, sous la baguette d’André Cluytens ; quant aux décors et costumes, ils sont signés par le peintre Fernand Léger. Une fois encore, c’est un immense succès pour la cantatrice, qui se renouvelle lors de la reprise de l’ouvrage, en décembre 1955.
Dans une interview, Janine Micheau a évoqué, avec beaucoup de chaleur, Darius Milhaud : « J’admire très fort [Darius Milhaud], l’homme et le musicien. J’ai eu la chance de participer à la création de deux de ses ouvrages lyriques, Médée et Bolivar. Chez Milhaud, le raffinement et la virtuosité de la composition vocale sont toujours étroitement associés au caractère très humain du personnage ou de l’idée exprimée. C’est le cas de Manuela dans Bolivar : une femme farouchement passionnée que l’amour conduit au sacrifice féminin le plus difficile peut-être, l’effacement quotidien devant le souvenir d’une autre. » Darius Milhaud, de son côté, composera plusieurs mélodies pour la cantatrice.

TRIOMPHES AU PALAIS GARNIER
À l’Opéra de Paris, Janine Micheau est Gilda (Rigoletto), Sophie du Chevalier à la rose (1941, avec Germaine Lubin en Maréchale, puis 1957, cette fois auprès de Régine Crespin), Juliette (600e représentation au Palais Garnier, en 1953, du Roméo et Juliette de Gounod, aux côtés de José Luccioni), Constance (L’Enlèvement au sérail), Violetta (La Traviata), Zerline dans Don Juan (reprise de 1956, avec Jacqueline Brumaire et Ernest Blanc)… Surtout, elle participe à deux des grandes nouvelles productions de l’Opéra, véritables événements rassemblant le Tout-Paris de l’époque.
En juin 1952, c’est la résurrection des Indes galantes de Rameau, dans l’édition révisée de Paul Dukas et Henri Busser. Sous la baguette de Louis Fourestier et dans une mise en scène de Maurice Lehmann, Janine Micheau interprète Fatime dans la troisième Entrée (« Les Fleurs, fête ­persane »), aux côtés de Denise Duval (Zaïre), Jean Giraudeau (Tacmas) et Jacques Jansen (Ali). Puis, en décembre 1954, elle incarne Pamina dans La Flûte enchantée (version française de Jean Sarment), auprès du Tamino de Nicolai Gedda et de la Reine de la Nuit de Mado Robin. La mise en scène, cette fois encore, est signée Maurice Lehmann, dans des décors de Chapelain-Midy, Georges Sebastian étant au pupitre.

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