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Il trovatore à Orange

11/07/2025
Yusif Eyvazov et Anna Netrebko. © Philippe Gromelle

Théâtre Antique, 6 juillet

C’est bien davantage qu’en « version de concert », comme annoncée, que les Chorégies d’Orange ont proposé Il trovatore lors de cette soirée unique, sur fond d’images projetées sur le mur du Théâtre Antique qui suggèrent efficacement les lieux des tableaux successifs. Les protagonistes investissent en effet l’immense plateau et jouent avec une densité théâtrale qui nous fait vite oublier l’absence de mise en scène.

En tête d’affiche, la Leonora d’Anna Netrebko paraît démarrer avec précaution dans « Tacea la notte placida », accompagnée d’un vibrato bien présent et aux extensions prudentes vers l’aigu. Le timbre charme toutefois d’emblée et l’interprète sait varier les nuances dès une splendide reprise mezza voce de la cabalette qui suit, jusqu’à un quatrième acte d’anthologie. « D’amor sull’ali rosee » est une merveille de musicalité et de pureté de son, culminant sur la cadence finale où la chanteuse tient longuement la note, en même temps qu’elle balaie du regard l’ensemble de l’auditoire à 180 °… Succès garanti ! Yusif Eyvazov en Manrico ne possède pas intrinsèquement les mêmes qualités de séduction vocale. Son air « Ah! sì, ben mio » est toutefois conduit avec goût, puis sa cabalette « Di quella pira » donnée avec une exceptionnelle générosité de puissance et de souffle.

Marie-Nicole Lemieux se montre moins homogène en Azucena, entre de très beaux passages et plusieurs aigus enflés pour lesquels la contralto canadienne se laisse emporter dangereusement en direction du cri. Le baryton Aleksei Isaev chante avec une certaine noblesse, en particulier un legato appliqué pour dérouler « Il balen del suo sorriso », mais sans ampleur particulière dans la partie haute du registre, qui se révèle occasionnellement plus fragile. Grigory Shkarupa marque davantage nos oreilles, voix de basse sombre et sonore, tout comme Claire de Monteil, instrument ferme, de qualité homogène et bien projeté.

L’Orchestre Philharmonique de Marseille fait un sans-faute, logiquement très bien préparé pour avoir joué l’ouvrage début juin dans la cité phocéenne. Jader Bignamini impulse ce soir une direction à fort relief, plutôt spectaculaire et qui donne une grande force aux sommets de tension de la partition, ralentissant par ailleurs de nombreux passages pour se mettre au service des chanteurs. Les Chœurs des Chorégies et de l’Opéra Grand Avignon participent avec vaillance à cette fête du chant.

FRANÇOIS JESTIN

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