Concerts et récitals Capiteuse Sonya Yoncheva à Peralada
Concerts et récitals

Capiteuse Sonya Yoncheva à Peralada

09/09/2022
Sonya Yoncheva et Malcolm Martineau. © Toti Ferrer

Esglesia del Carme, 2 août

Deuxième récital de l’été dans la somptueuse Église du Carmen. À une mezzo encore en début de carrière, Emily D’Angelo, succède une soprano dans son plein épanouissement vocal et artistique. Avouons que, pour ses débuts au Festival « Castell de Peralada », Sonya Yoncheva n’a pas déçu les attentes du public, soutenue par le piano impeccable de Malcolm Martineau.

D’un rayonnement physique irrésistible, la diva bulgare déploie d’emblée une voix reposée – le bénéfice des semaines de pause consécutives à l’annulation de La Gioconda, à la Scala de Milan, en juin dernier ? –, plus capiteuse que jamais, avec ces couleurs et ces inflexions sensuelles qui n’appartiennent qu’à elle. La puissance naturelle de l’instrument est, sans doute, un peu excessive pour un lieu aussi intime et à l’acoustique aussi réverbérée. Mais comment ne pas rendre les armes devant pareille splendeur ?

Entièrement constitué de mélodies, ce qui est rare à Peralada, le programme enchaîne une première partie française et une deuxième italienne. Les quatre Duparc (L’Invitation au voyage, Au pays où se fait la guerre, La Vie antérieure, Chanson triste) et les trois Chausson (Le Temps des lilas, Le Charme, Sérénade italienne) en constituent l’unique point faible : ces pièces exigent un travail bien plus approfondi sur l’intelligibilité et la mise en valeur des poèmes, ici noyés dans une opulence sonore trop uniforme.

Haï luli ! de Pauline Viardot, Depuis qu’une autre a su te plaire de Donizetti et, surtout, Les Filles de Cadix de Delibes passent nettement mieux, mais c’est vraiment après l’entracte que l’on retrouve Sonya Yoncheva sur son terrain de prédilection. Dans des mélodies ressemblant souvent à des airs d’opéras, la cantatrice plonge l’auditeur dans l’ivresse.

Chantés avec autant de volupté et d’abandon, Tosti (L’ultimo bacio, Ideale) et Martucci (Al folto bosco) diffusent comme jamais leur subtil charme « fin de siècle ». Verdi (In solitaria stanza, Ad una stella, L’esule) bénéficie d’un instinct théâtral sans faille. Dans Puccini, enfin (Sole e amore, Terra e mare, Menti all’avviso, Canto d’anime), l’émotion du phrasé conduit l’auditeur au bord des larmes.

Même chose dans les premier et troisième bis (« Donde lieta usci » de La Bohème, « Adieu, notre petite table » de Manon), où la sensibilité à fleur de peau de l’interprète et son sens du pathos savamment dosé bouleversent. Le deuxième est le plus intéressant : une « Habanera » de Carmen idéalement canaille et aguicheuse, dans une perspective certes très conventionnelle du personnage, mais dans un français soigné et avec un capital de séduction dévastateur sur le public. Une future prise de rôle ?

RICHARD MARTET


Sonya Yoncheva et Malcolm Martineau. © Toti Ferrer

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