Opéra Bastille, 7 décembre
Pour sa troisième reprise, la production de Claus Guth, créée en avril 2016, triomphe des réserves qu’elle avait pu, initialement, susciter (voir, en dernier lieu, O. M. n° 178 p. 68 de décembre-janvier 2021-2022).
C’est que le plateau vocal, entièrement nouveau – hors le Sparafucile, toujours bien chantant, de la basse géorgienne Goderdzi Janelidze –, et très judicieusement équilibré, est globalement supérieur, peut-être, aux précédents.
D’abord pour les décisives relations entre père et fille, grâce à une affinité visible entre le très impressionnant Rigoletto de Roman Burdenko et la Gilda de Rosa Feola. Doté d’une émission puissante, le baryton russe sait déployer une palette de nuances constamment renouvelée, révélant, aussi, un acteur de première force, intensément concentré et expressif.
La soprano italienne a, quant à elle, le profil idéal d’une jeune fille de 16 ans : voix ronde et homogène, agile dans la vocalise, et d’une infinie délicatesse, quand il le faut.
Mais on n’est pas moins subjugué par le Duc de Liparit Avetisyan. Le ténor arménien pose un personnage véritablement passionné, et toujours d’une élégante noblesse, plutôt que le libertin relâché qu’on voit souvent. Il y ajoute le charme d’un timbre au médium chaleureux, et un parfait legato, d’une séduction irrésistible.
Bonheur, encore, avec la Maddalena, au beau mezzo cuivré, de la française Aude Extrémo – ce qui nous vaut un splendide quatuor, au III. Hors pair, lui aussi, l’éclatant Monterone du baryton américain Blake Denson.
Domingo Hindoyan, enfin, fait des débuts enthousiasmants dans la fosse de l’Opéra National de Paris. Alliant impeccable précision et sens du drame, le chef vénézuélien passe du panache le plus contrôlé aux plus subtils raffinements.
Une direction qui porte à leur meilleur les Chœurs, préparés par Alessandro Di Stefano, et l’Orchestre de l’Opéra National de Paris, visiblement galvanisé.
FRANÇOIS LEHEL