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Lumière dans la nuit – éditorial du numéro de mai

19/04/2021

Les maisons d’opéra européennes, presque toutes fermées au public depuis l’automne, vont-elles réussir à sauver leur fin de saison, en accueillant enfin des spectateurs ? L’heure de vérité est sur le point de sonner, et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’optimisme n’est pas de rigueur.

En façade, les sites internet des théâtres affichent toujours les productions prévues après la date d’un éventuel desserrement des contraintes sanitaires (le 15 mai, pour ce qui concerne la France), mais, en « off », beaucoup de directeurs ne cachent pas leur scepticisme. D’ailleurs, il est rare que la location soit déjà ouverte pour ces spectacles, quand bien même le lever de rideau est prévu dans moins d’un mois.

Certains y croient vraiment, comme le Covent Garden de Londres – ville où, depuis le 12 avril, terrasses de bars et restaurants, magasins de vêtements, salles de sport et spas sont à nouveau accessibles. Cinémas et théâtres devant rouvrir le 17 mai, au Royaume-Uni, en jauge réduite et avec de stricts protocoles sanitaires, le Royal Opera House a prévu, ce soir-là, une nouvelle production de La clemenza di Tito, signée Richard Jones.

L’optimisme britannique, on le sait, est motivé par de bons indicateurs sur le front de la pandémie. Dans les pays où les chiffres de contamination, d’hospitalisation et de décès demeurent très hauts, on comprend l’attentisme, plus ou moins teinté de pessimisme, des décideurs. Surtout que, derrière les fins de saison, se profilent les festivals de l’été.

À un horizon plus lointain, certes, qui autorise davantage d’espoirs, mais, là encore, sans aucune garantie. A priori, les manifestations de plein air bénéficient d’un avantage, celui d’une propagation du virus nettement réduite. Pourtant, l’Opéra National de Grèce, à son grand désespoir, vient d’annuler la nouvelle mise en scène de Rigoletto, prévue à l’Odéon d’Hérode Atticus d’Athènes, le 30 mai. Les chiffres de la pandémie sont encore trop hauts… Croisons les doigts pour que Bregenz, Macerata, Martina Franca, Orange, Peralada, Torre del Lago ou Vérone ne connaissent pas les mêmes affres !

Dans ce contexte de doutes et d’incertitudes, la nomination, le 16 avril, de Gustavo Dudamel au poste de directeur musical de l’Opéra National de Paris, très commentée à travers le monde, a fait l’effet d’une lumière dans la nuit. Jeune (40 ans), charismatique, excellent chef de fosse (même s’il a peu dirigé l’opéra jusqu’ici), apprécié des musiciens, sensible aux problématiques d’ouverture, de diversité et de mixité sociale, il coche toutes les cases. Un grand bravo à Alexander Neef, directeur général de la « Grande Boutique » depuis moins d’un an !

Pour ce dernier, l’arrivée du chef vénézuélien est une aubaine. Car l’Opéra traverse une période difficile, marquée par une baisse drastique des recettes de billetterie, que ne sauraient évidemment compenser celles du streaming. Très attendues, les nouvelles productions d’Aida et Faust, commandées par Stéphane Lissner avant son départ, se sont certes jouées, mais sans public, pour le seul bénéfice des caméras.

Quel sera maintenant le sort de la création mondiale du Soulier de satin de Marc-André Dalbavie, prévue le 21 mai, six jours après l’éventuel desserrement des contraintes annoncé par Emmanuel Macron ? L’enjeu est considérable, et l’on imagine que, même si les portes du Palais Garnier restent fermées aux spectateurs, la production sera au moins filmée.

Ensuite, à l’Opéra de Paris, comme dans les autres théâtres à travers le monde, les regards se tourneront vers la rentrée, Alexander Neef et ses confrères ayant prévu d’annoncer le contenu de leur saison 2021-2022 avant l’été, et le début des festivals. Le temps de l’espoir sera alors venu, même s’il faudra des mois avant que l’on assiste à une représentation dans les mêmes conditions qu’avant la crise du Covid-19.

L’opéra sans le masque, ce n’est pas pour demain, ni même pour après-demain !

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