Fermé jusqu’au mois de janvier 2021, le Metropolitan Opera de New York lance, cet été, une série de retransmissions de récitals en direct, qui se poursuivra jusqu’au 19 décembre. Uniquement accessibles sur le site du Met (www.metopera.org), pour le prix de 20 $ chacun, ces récitals peuvent être regardés sur ordinateur, tablette, smartphone, voire sur votre téléviseur (si vous disposez d’AirPlay ou Chromecast). Si vous les ratez en direct, ils restent à votre disposition pendant douze jours suivant la retransmission.
L’honneur d’inaugurer la série est revenu à Jonas Kaufmann, accompagné par Helmut Deutsch, le samedi 18 juillet. Installés sur une estrade, dressée à l’intérieur d’une salle de l’ancien monastère bénédictin de Polling, dans le sud de la Bavière, ténor et pianiste ont enchaîné 14 extraits d’opéras (12 chantés, 2 instrumentaux), comptant parmi les « tubes » du répertoire français et italien.
Introduit par la soprano Christine Goerke et Peter Gelb, le directeur du Met, s’exprimant depuis un studio au cœur de Manhattan, le programme ne réserve aucune surprise. Tous ces airs figurent au programme des différents récitals discographiques de Jonas Kaufmann (Romantic Arias et Verismo Arias chez Decca, Nessun dorma et L’Opéra chez Sony Classical) et le ténor allemand a l’habitude de les interpréter en concert aux quatre coins du monde.
Flattée par la très belle acoustique de la salle, la voix sonne en bonne forme, plus sombre que jamais, avec ce timbre immédiatement reconnaissable et cette urgence dans l’accent absolument uniques. Quant au charisme de l’acteur, même dans le cadre d’un récital, il s’impose à chaque instant, admirablement mis en valeur par les gros plans de Gary Halvorson.
Une réserve, quand même : Jonas Kaufmann a tendance à tout chanter de la même manière, en alternant aigus exaspérés et détimbrages parfois aux limites du scabreux. Federico de L’Arlesiana (« È la solita storia »), Don José dans Carmen (« La fleur que tu m’avais jetée »), Maurizio dans Adriana Lecouvreur (« L’anima ho stanca »), voire Mario Cavaradossi au dernier acte de Tosca (« E lucevan le stelle ») tirent le meilleur parti de ce chant constamment sous tension, de ces accents angoissés, de ces plongées dans les affres du désespoir. Les émerveillements du Roméo de Gounod (« Ah ! lève-toi, soleil »), Enzo de La Gioconda (« Cielo e mar ») et Vasco de Gama dans L’Africaine (« Ô paradis ») perdent, en revanche, l’essentiel de leur fraîcheur.
Entre les groupes d’airs, et pour permettre au chanteur de se reposer, le Met introduit quatre électrisants extraits de représentations filmées : La fanciulla del West, Werther et Die Walküre à New York, Pagliacci à Salzbourg.
Prochain rendez-vous le samedi 1er août, avec Renée Fleming, en direct du Dumbarton Oaks Museum de Washington.
RICHARD MARTET
PHOTO © METROPOLITAN OPERA