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Concerts et récitals

La Resurrezione sagace de Marc Minkowski à Aix-en-Provence

05/04/2024
© Festival de Pâques/Caroline Doutre

Grand Théâtre de Provence, 26 mars

Créé à Rome, au Palazzo Bonelli, en 1708, pour le dimanche de Pâques, l’oratorio La Resurrezione ne cesse de fasciner par son irrépressible audace vocale et sa prodigieuse richesse instrumentale. Tour à tour éclatante et virtuose, intime et spirituelle, la partition du jeune Haendel renferme d’innombrables merveilles, auxquelles il est difficile de rester insensible.

Grand défenseur de l’ouvrage au disque – il en a gravé une version de référence, chez Archiv Produktion, en 1995 –, Marc Minkowski nous l’offre, cette fois, en concert, pour ses débuts au Festival de Pâques d’Aix-en-Provence.

Toujours très à son affaire avec l’écriture foisonnante du compositeur, le chef français nous en livre, de fait, une lecture magistrale, oscillant entre extraversion orchestrale et introspection chambriste. Que ce soit en termes d’élan, de respiration, de nuance ou de couleur, sa direction, qui se montre toujours d’une sagacité imparable, sait attiser la flamme de cet étonnant théâtre sacré.

Par sa battue ardente, communicative et généreuse, il emmène son ensemble Les Musiciens du Louvre vers des sommets de réactivité motrice, de pure poésie sonore : en grande forme, chaque instrumentiste déploie, sous son impulsion, des trésors de ductilité, pour servir la musique extraordinairement versatile de Haendel.

Côté solistes vocaux, le plaisir est, lui aussi, presque total. En Angelo, la soprano franco-allemande Caroline Jestaedt montre, sans conteste, que les roulades fuselées du tonitruant et volubile « Disseratevi, o porte d’Averno » ne lui font pas peur. Il n’en demeure pas moins que son timbre opalescent s’épanouit bien mieux dans les airs suivants. Le tendre « D’amor fu consiglio », le délicieux « Risorga il mondo », ou encore l’affable « Se per colpa di donna infelice » laissent, en effet, l’instrument dispenser ce qu’il a de plus charmeur et lumineux.

En Maddalena, la soprano suisse Ana Maria Labin distille, pour sa part, les émotions avec, parfois, un peu de réserve. À ce titre, « Ferma l’ali, e su miei lumi » manque d’abandon. « Per me già di morire » est, en revanche, superbe d’intensité sinueuse.

La mezzo norvégienne Astrid Nordstad est, quant à elle, saisissante de présence dans chacun des airs de Cleofe. Déroulant, avec un naturel confondant, le velours sombre et profond de son chant, elle subjugue dans l’hypnotique « Piangete, si, piangete », autant qu’elle impressionne dans l’impétueux « Naufragando va per l’onde ».

Très sonore, spectaculaire et virtuose, James Platt n’est pas en reste. La basse britannique ne fait qu’une bouchée des redoutables vocalises, dont Lucifero secoue « Caddi, è ver » et « O voi dell’Erebo ».

Enfin, il faut saluer l’extrême sensibilité du San Giovanni de son compatriote James Way. D’un ténor subtilement timbré et projeté, il livre, au fil des quatre airs qui lui sont dévolus, une émotion constante, dont « Caro figlio » cristallise la beauté la plus mélancolique.

Une célébration haendélienne de grande classe.

CYRIL MAZIN

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