Concerts et récitals Carte blanche à Michael Spyres à Paris
Concerts et récitals

Carte blanche à Michael Spyres à Paris

26/04/2024
Michael Spyres. © Mélanie Florentina

Sainte-Chapelle, 12 avril

Il vient d’interpréter son premier Lohengrin, à l’Opéra National du Rhin (voir O. M. n° 202 p. 63 de mai 2024) ; son nouvel album, In the Shadows, paru chez Erato – et couronné d’un Diamant d’Opéra Magazine, dans notre numéro de mars –, est un succès ; il s’apprête à chanter Licinius dans la nouvelle production de La Vestale, à l’Opéra National de Paris, avant de gravir la « Colline verte », l’été prochain, pour incarner Siegmund (Die Walküre). À 45 ans, Michael Spyres est partout, sur tous les fronts, dans tous les répertoires, singulier et sans limite, qui plus est, drôle et sympathique. Qui dit mieux ?

À la tête d’un impressionnant palmarès, résultat d’une carrière menée tambour battant, le ténor américain est sans rival, un pied dans le baroque, un autre dans le « grand opéra » français, après s’être imposé dans le bel canto et lorgnant, désormais, les terres wagnériennes. Jusqu’où ira-t-il ? Nul ne le sait encore, mais chacun de ses rendez-vous est un plaisir.

Carte blanche lui a été confiée, dans le cadre de la deuxième édition du « Paris Sainte-Chapelle Opera Festival ». Au programme, uniquement des airs italiens, de Rossini et Bellini, mais aussi Meyerbeer et Liszt. Dans cet écrin à la très belle acoustique, la voix de Michael Spyres est immense – qu’il s’agisse de s’apparier à de « simples » mélodies, comme Amori scendete de Rossini, à la ligne ciselée, sur laquelle se greffent de subtiles ornementations, ou à La ricordanza, composée sur une réminiscence d’I puritani par Bellini, lui-même.

L’air d’Adriano, « Suona funerea », extrait d’Il crociato in Egitto de Meyerbeer, a toute sa place dans ce lieu de prière, idéal pour que cet hymne d’adieu à la vie, chanté à fleur de lèvres dans le plus grand recueillement, nous livre ses secrets.

Avant le feu d’artifice, Michael Spyres et son accompagnateur, l’excellent Mathieu Pordoy, proposent le Rossini malicieux et salonnard des Soirées musicales. L’éruption volcanique a lieu avec « Cessa di più resistere », air final impossible d’Il barbiere di Siviglia, trop longtemps oublié. Le ténor n’en fait qu’une bouchée, vocalisant avec une désarmante facilité et un enthousiasme communicatif.

Après un rapide intermède, constitué par une pièce pour piano, issue des Péchés de vieillesse de Rossini, le chanteur s’éloigne des roulades et autres exercices de style, pour nous ramener à l’essentiel, à la beauté brute des Trois Sonnets de Pétrarque (Tre sonetti di Petrarca). N’est-ce pas, finalement, sans artifice, sans recours à un vocabulaire belcantiste ébouriffant, mais seul, face à la pureté du texte, souligné par les sublimes harmonies lisztiennes, que Michael Spyres se montre le meilleur ? Simplicité du discours, largeur vocale, développement de la pensée et des affects, ces trois pièces résonnent dans ce haut lieu avec une puissance inattendue.

Pour conclure ce beau moment, et répondre aux applaudissements nourris, qui fêtaient le double anniversaire du ténor et de son pianiste, le duo se lance, avec une fougue contagieuse, dans La danza de Rossini – tarentelle évidemment endiablée et… triomphale.

FRANÇOIS LESUEUR

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