Duomo, 4 septembre
Au cœur du Duomo, en ce vendredi 4 septembre, le Teatro alla Scala propose le Requiem de Verdi, en présence de Sergio Mattarella, président de la République italienne, Mario Delpini, archevêque de Milan, et Giuseppe Sala, maire de la ville, entourés de représentants des corps constitués. Le 7 septembre, le concert sera répété à Bergame, puis, le 9, à Brescia, deux autres villes de Lombardie ayant payé un lourd tribut humain à l’épidémie de Covid-19. Une nouvelle fois dans son histoire, la Scala assume ainsi le rôle de témoin au sein de la société dans laquelle elle est ancrée.
Ce Requiem se présente, d’emblée, comme un moment de concentration spirituelle. Verdi, on le sait, n’était pas croyant, mais la pièce n’en possède pas moins une forte dimension religieuse. Riccardo Chailly la dirige comme une méditation sur la douleur et l’espérance, comme une interrogation sur le destin ultime de l’homme, celle-là même qui interpellait tant le compositeur.
Le lieu aidant, on n’a pas une seule seconde l’impression d’être au théâtre. Les tempi ne sont pas lents, mais sereins, jusque dans les passages les plus agités, et le concert baigne dans une atmosphère d’intense spiritualité. Le chef a l’art d’unir le sens de la fresque et la mise en valeur des plus infimes détails de l’écriture, servi par une acoustique certes réverbérée – on est dans une cathédrale ! –, mais que je qualifierais de « mystique ».
Les chœurs de la Scala, admirablement préparés par Bruno Casoni, confirment à la fois leur excellence et leurs affinités avec la musique de Verdi. Surtout dans ce Duomo, centre de la spiritualité ambrosienne dont Alessandro Manzoni, à la mémoire duquel le Requiem fut écrit, était le dépositaire.
Chacun avec sa personnalité artistique et vocale, les solistes se coulent dans la conception de Riccardo Chailly. Francesco Meli, authentiquement inspiré par l’œuvre et les circonstances, délivre un Hostias d’une émotion saisissante, avant une entrée d’une douceur miraculeuse dans Lux aeterna.
Remplaçant Ildar Abdrazakov, initialement annoncé, René Pape est impressionnant de sévérité, presque d’ascétisme. Elina Garanca, pour sa part, déploie son instrument somptueux avec ce qu’il faut de détermination et de douceur, selon les moments.
Enfin, Krassimira Stoyanova – pour Tamara Wilson, prévue au départ – se signale par ses accents d’une intensité poignante, en particulier dans un vibrant Libera me, dont le pianissimo conclusif résonne dans le silence des pierres comme une ultime invitation au recueillement.
GIANCARLO LANDINI
PHOTO © TEATRO ALLA SCALA/BRESCIA/AMISANO