Comptes rendus Étoiles de Naples (Aida)
Comptes rendus

Étoiles de Naples (Aida)

06/08/2020

Piazza del Plebiscito, 25 juillet

C’est sur la Piazza del Plebiscito, devant le Palazzo Reale, que le Teatro San Carlo a choisi d’organiser son mini-festival d’été en plein air. Un décor naturel suggestif, au sein duquel se sont affrontés, dans Aida, trois artistes parmi les plus recherchés du moment : l’irrésistible Jonas Kaufmann, distribué pour la première fois à Naples dans un opéra complet ; l’impressionnante Anita Rachvelishvili, dans l’un de ses rôles de prédilection ; et la spectaculaire Anna Pirozzi, enfant du pays, authentique ambassadrice du soprano drammatico d’agilità.

Crise sanitaire oblige, les chanteurs entrent et sortent selon les besoins de l’action, mais ne se touchent jamais, restant même à bonne distance les uns des autres, alignés devant l’orchestre. Cette immobilité ne nuit pas autant qu’on pouvait le craindre à la tension dramatique, Michele Mariotti imposant des tempi énergiques, « toscaniniens », serait-on tenté d’écrire, à un orchestre du San Carlo de bon niveau. Le chef italien ne perd pas pour autant de vue les détails de l’instrumentation, auxquels la version de concert permet à l’auditeur de mieux prêter attention.

Les chœurs sont également en place, martiaux comme il le faut dans le premier tableau de l’acte I (électrisant « Guerra e morte allo stranier ! »). Dommage qu’un système d’amplification mal réglé écrase le son dans les ensembles fortissimo, créant de pénibles effets de distorsion.

Avec l’élégance physique d’un play-boy en vacances, Jonas Kaufmann démarre très bien et conquiert le public avec un « Celeste Aida » percutant de timbre, impeccable de diction. Solide dans ses affrontements avec Ramfis et Amonasro (les excellents Roberto Tagliavini et Claudio Sgura), ce chanteur-acteur d’exception peine, dans le contexte d’une version de concert, à traduire les subtilités de l’évolution psychologique de Radamès. Mais c’est surtout la fatigue progressive de la voix qui inquiète, avec, au dernier acte, une émission peu soignée, affligée de trop de sonorités rauques. Aléas du plein air ? On l’espère.

Malgré une diction manquant de clarté, Anita Rachvelishvili domine de la tête et des épaules le rôle d’Amneris, le moment le plus saillant de son incarnation restant son duo passionné avec Radamès. L’Aida d’Anna Pirozzi lui tient tête dans leur duo, avec des raffinements dans le phrasé qui rappellent le statut de princesse de l’esclave éthiopienne. Pour elle, le sommet de la soirée restera « O cieli azzurri ».

GIOVANNI D’ALO

PHOTO © MARIO WURZBURGER

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