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Comptes rendus

Rolando Villazon aborde I puritani à Düsseldorf

26/01/2020

Deutsche Oper am Rhein, 5 janvier

Désormais bien installé dans ses fonctions de directeur artistique de la « Semaine Mozart » (« Mozartwoche ») de Salzbourg, et tout en continuant à chanter, Rolando Villazon poursuit, comme metteur en scène, une troisième carrière parallèle. À Düsseldorf, où il avait déjà monté Don Pasquale, en 2017, on le retrouve ainsi pour des Puritani d’aspect plutôt sage au premier abord.

L’action se déroule dans un décor unique, vaste espace où des lambris aux formes gothiques sont surmontés de briques bleutées. Église et parlement tout à la fois, il renvoie bien à l’Angleterre du début du XVIIe siècle, ce que semblent confirmer des costumes austères, quoique splendides, des coiffes soumises et des attitudes rigides. Par ailleurs, Rolando Villazon se contente d’une direction d’acteurs rudimentaire, dont le seul mérite est de laisser les solistes se placer au mieux pour affronter les périls de la partition.

Pourtant, cette lecture n’est pas traditionaliste. Il y a, d’abord, ces kalachnikovs dont les chœurs s’arment frénétiquement, dans un climat de violence à peine contenue. Le choix de ces armes contemporaines plutôt que de mousquets, qui siéraient mieux au reste de l’univers scénique, semble ne pas avoir de raison dramaturgique réelle, sinon l’éternelle volonté de « parler au public d’aujourd’hui ».

Mais, connaissant  Rolando Villazon, on peut se demander si le recours à ce poncif du « Regietheater » n’est pas aussi un pied de nez à tous ceux qui, en Allemagne, avaient taxé son Don Pasquale de « passéiste ». Comme s’il avait voulu dire à ses détracteurs : « Vous voulez des kalachnikovs ? En voilà ! »

La distanciation est ailleurs. Dans ces mouvements de main ensorcelants des chœurs, comme des plantes vénéneuses qui tenteraient de capturer les solistes. Dans ce mystérieux mouchoir ensanglanté que, dès l’Ouverture, les protagonistes s’échangent. Dans cette scène de dégradation de Gualtiero, le père d’Elvira, qu’on ne comprend pas plus qu’on ne comprend sa réinstallation ultérieure. Et dans ce finale où, loin du « happy end » prévu, Arturo semble prêt à rejoindre Enrichetta, en abandonnant à nouveau sa fiancée !

Au bilan, cette mise en scène ne laisse pas le sentiment d’une vision forte, ni très cohérente, mais elle évite le kitsch. Et les éléments inattendus qu’elle injecte ont, au moins, le mérite de ne pas troubler le plaisir que laisse la réalisation musicale.

D’abord, Adela Zaharia se révèle une Elvira d’anthologie. Rondeur et plénitude du timbre, perfection de l’intonation, juste mélange de rigueur et de souplesse dans les coloratures, projection… La soprano roumaine confirme avec éclat que le Premier prix qu’elle avait remporté au Concours « Operalia », en 2017, n’était en rien usurpé.

Son compatriote Ioan Hotea, lui aussi Premier prix d’« Operalia », mais deux ans plus tôt, offre un irrésistible Arturo, juvénile et enflammé. Le triomphe roumain de la soirée se prolonge avec le Giorgio dur et inquiétant, mais vocalement somptueux, de Bogdan Talos.

Le baryton mexicain Jorge Espino a de l’énergie et de la générosité à revendre, mais son Riccardo frise, çà et là, la vulgarité. La basse britannique Thomas Faulkner, la mezzo germano-éthiopienne Sarah Ferede et le ténor vénézuélien Andres Sulbaran complètent ce superbe plateau, qu’Antonino Fogliani contrôle avec bienveillance et souplesse. Les tempi du chef italien contribuent grandement à la réussite de ce feu d’artifice lyrique.

NICOLAS BLANMONT

© HANS JÖRG MICHEL

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