Comptes rendus Claps de début et de fin
Comptes rendus

Claps de début et de fin

19/08/2019

Enfin ! Après avoir (trop) longtemps tergiversé, le président de la République a nommé, le 24 juillet, le successeur de Stéphane Lissner à la tête de l’Opéra National de Paris. Il s’agit de l’Allemand Alexander Neef, directeur général de la Canadian Opera Company (COC) de Toronto depuis 2008, qui figurait parmi les quatre candidats retenus par le comité de présélection en mars dernier et que des « fuites » donnaient gagnant depuis la fin du mois de juin.

Un excellent choix : Alexander Neef est jeune (45 ans), il connaît bien la maison pour en avoir été le responsable du casting entre 2004 et 2008, sous le mandat de Gerard Mortier, et il a fait de l’excellent travail à la COC, première compagnie d’opéra du Canada et l’une des plus importantes du continent nord-américain.

Contrairement à ce qu’avançaient les mêmes « fuites », il prendra ses fonctions dès la fin du mandat de son prédécesseur, en août 2021. Ce qui lui laisse peu de temps pour bâtir sa première saison… À titre d’exemple, Bogdan Roscic, qui succèdera à Dominique Meyer à la tête du Staatsoper de Vienne, en septembre 2020, a été nommé en décembre 2016 !

Interviewé au débotté par le New York Times, Alexander Neef a annoncé vouloir mettre l’accent sur les commandes et l’exploration du répertoire français, deux sillons déjà labourés par ses prédécesseurs immédiats, mais dont on est heureux de le voir se soucier. Tout aussi important, dans le contexte budgétaire actuel, le futur directeur a acquis une précieuse expérience en matière de « fundraising », les théâtres nord-américains dépendant peu, voire pas du tout, des subventions publiques. Il s’y connaît donc en collecte de fonds privés et il aura bien besoin de cette expertise dans ses nouvelles fonctions.

La Scala a également trouvé son nouveau surintendant et directeur artistique. Dominique Meyer, qui figurait parmi les quatre candidats retenus par le comité de présélection de l’Opéra National de Paris, a finalement été nommé à Milan, le 28 juin. De juin 2020 à juin 2021, il partagera son fauteuil avec son prédécesseur, Alexander Pereira, dont le contrat a été prolongé jusqu’à cette date, puis il fera cavalier seul.

Là encore, le choix est excellent (comme il l’aurait été pour l’Opéra de Paris). Dominique Meyer est un homme compétent et habile, qui sait prendre en compte les spécificités des théâtres et des publics auxquels il a affaire, quitte à ne pas paraître suffisamment audacieux, dans ses choix de metteurs en scène, aux yeux de ses détracteurs.

La nomination du nouveau directeur général de l’Opéra de Lyon est également en bonne voie. Un nouvel appel à candidature a été lancé en juillet, les postulants ayant jusqu’au 9 septembre pour envoyer leur dossier. Un jury procèdera ensuite à une préselection, avant d’auditionner les candidats retenus courant octobre. Le conseil d’administration souhaite procéder à la nomination avant la fin de l’année, après agrément du maire de Lyon et du ministre de la Culture.

Sur le papier, tout semble normal. Mais après l’invraisemblable pataquès du printemps dernier, qui a conduit à l’annulation pure et simple de la procédure de recrutement entamée début 2019, alors même que le jury de présélection avait choisi son favori (voir mon précédent éditorial, en page 3 du numéro de juillet-août), on ne peut s’empêcher d’éprouver quelques craintes… Souhaitons que la leçon ait été retenue !

Un mot, enfin, de l’affaire qui secoue le milieu de l’opéra depuis le 13 août : les accusations de harcèlement sexuel portées contre Placido Domingo par huit chanteuses et une danseuse, qui ont soulevé une tempête de réactions dans la presse et sur les réseaux sociaux. Aussitôt, l’Orchestre de Philadelphie a rayé l’artiste de l’affiche de son gala d’ouverture de saison, le 18 septembre, et l’Opéra de San Francisco a annulé son concert du 6 octobre.

Plus raisonnable, le Metropolitan Opera de New York, où Placido Domingo doit incarner Macbeth à partir du 25 septembre, a dit attendre les résultats de l’enquête ouverte à Los Angeles, avant de prendre une décision. Le Palau de les Arts de Valence, le Staatsoper de Vienne et le Covent Garden de Londres ont, pour leur part, annoncé qu’ils ne changeaient rien à leur programmation de la saison prochaine.

La vague #MeToo est une déferlante. À qui le tour maintenant ?

RICHARD MARTET

PHOTO : Alexander Neef. © DR

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