Opéra Confluence, 20 janvier
La sobriété est sans doute ce qui caractérise le mieux, tant musicalement que scéniquement, cette nouvelle production de l’Opéra Grand Avignon. Le décor de Lionel Lesire, identique pour les quatre actes, est tout simple : un plan incliné en bois blanc ; cinq hautes fenêtres au fond, derrière lesquelles Roberto Venturi varie avec science les lumières (or, mauve, bleu…) ; l’ajout de petites ampoules au plafond et de quelques tables rondes pour le café Momus, puis d’une maison en bois à l’arrière-plan pour la barrière d’Enfer, et enfin d’un matelas et d’un édredon posés sur le sol pour la mort de Mimi.
Les costumes, fidèles à l’époque Louis-Philippe, sont à l’avenant, jouant sur les oppositions de couleur pour les deux héroïnes : Mimi en blanc, Musetta en rouge. Quant à la mise en scène de Frédéric Roels et Claire Servais, elle ne cherche pas à raconter autre chose que l’intrigue, telle que Puccini et ses librettistes, Giacosa et Illica, l’ont imaginée, tout en veillant à la crédibilité des mouvements, gestes et attitudes.
En fosse, l’Orchestre Régional Avignon-Provence confirme les progrès constatés, ces dernières saisons, sous la houlette de Samuel Jean, son « premier chef invité ». Celui-ci bannit tout sentimentalisme de sa lecture, sans pour autant sacrifier le velours et la sensualité inhérents à la partition. La passion, l’ivresse, le pathos sont au rendez-vous quand il le faut, mais sans rien de sirupeux, trivial ou banalement mélodramatique.
L’osmose est parfaite avec la Mimi de Ludivine Gombert, impeccablement chantée comme toujours, mais dont la réserve peut gêner au premier acte, dans ces passages où l’on s’attend à davantage d’abandon. Plus l’opéra avance, plus cette conception toute d’ascèse et de retenue se justifie en regard du texte et de la musique, jusqu’à une mort bouleversante, phrasée sans aucun effet superflu.
Pleine de vivacité, la Musetta d’Olivia Doray accuse une justesse aléatoire dans l’aigu, tandis que Philippe-Nicolas Martin, Boris Grappe et David Ireland se distinguent vocalement, au sein d’un quatuor de bohèmes scéniquement efficace.
Dommage que Davide Giusti ait été souffrant, lors des deux représentations programmées. Le 20 janvier, l’annonce avant le début du spectacle s’est avérée bienvenue, tant le ténor italien, Deuxième prix du Concours « Operalia », en 2017, n’a jamais été en mesure de déployer l’étendue de son talent. Chantant à l’économie, il a laissé entrevoir, ici et là, ses remarquables qualités de timbre, sans réussir à éviter que le plateau ne sonne déséquilibré. Par chance, il y avait suffisamment de motifs de satisfaction autour, pour passer une excellente matinée !
RICHARD MARTET
PHOTO : © CÉDRIC & MICKAËL/STUDIO DELESTRADE