Arrivé plus tôt que prévu, le nouveau directeur général, nommé en 2019, a dû gérer une saison 2020-2021 chaotique, entre spectacles annulés ou filmés à huis clos. Le ciel s’étant éclairci, il a présenté, le 18 mai, une programmation alléchante pour 2021-2022, qui s’ouvrira, en septembre, avec la première parisienne de 7 Deaths of Maria Callas, puis une reprise d’Iphigénie en Tauride de Gluck, au Palais Garnier. Suivra le premier événement, particulièrement attendu par tous les amateurs d’opéra français : une nouvelle production du splendide Œdipe d’Enesco, à l’Opéra Bastille, le 23 septembre. Alexander Neef s’explique sur ses choix pour cette future saison, la première entièrement conçue par ses soins, tout en évoquant les difficultés et les enjeux pour les années à venir : contraintes budgétaires, ouverture à la diversité, reconstitution d’une troupe…
Sous les mandats de vos prédécesseurs, la brochure de saison de l’Opéra National de Paris a souvent pris des allures de catalogue d’art contemporain. Vous avez, en rupture avec cette habitude, fait le choix de mettre en avant les personnels de la maison…
C’est une volonté de ma part, qui s’est développée pour une raison assez banale. Nous avons dû choisir une nouvelle agence de communication, et celle qui a gagné le marché public a proposé de faire un shooting pour chaque opéra et ballet. La discussion sur la campagne de lancement de la saison a commencé en plein premier confinement. Il fallait vraiment, à la sortie de cette crise, mettre en avant tous ceux qui font l’Opéra. Parce qu’un théâtre n’est pas seulement une architecture. Ce sont des gens, et pas seulement ceux que l’on voit, ou que l’on entend. Le spectacle n’est que le résultat visible d’un travail qui fonctionne en coulisse. Nous avons demandé à des personnes de toutes les directions de se porter volontaires, puis la photographe Emma Birski a choisi en toute liberté qui elle voulait, pour quelle pièce, et comment les mettre en scène. Je suis à peine intervenu, car la relation avec un artiste doit être basée sur la confiance.
Après des mois de crise sociale, puis sanitaire, quel était le moral des troupes à votre arrivée ?
Il n’était pas mauvais. Sans doute aurait-il été beaucoup plus difficile pour moi d’arriver le 1er août 2021, comme prévu à l’origine, car nous n’aurions pas vécu la crise ensemble. Avoir pu traverser avec eux cette année difficile nous prépare mieux pour notre futur commun. Même si j’ai eu moins d’un mois pour quitter Toronto et m’installer à Paris, je suis très content d’être déjà là.
Votre prise de fonction a été mise en scène, de façon inédite, au ministère de la Culture, et assortie d’une mission confiée à Georges-François Hirsch et Christophe Tardieu, dont les conclusions n’ont pas été révélées. Les avez-vous prises en compte ?
Il s’agissait d’une commande de la ministre, Mme Bachelot, pensée comme une aide à la décision. Nous aimerions tous être dans la situation où nous pourrions affirmer que le Covid-19 s’est éteint, pour nous projeter dans l’avenir. Nous avons beaucoup d’échanges avec le ministère sur des sujets concrets, les problèmes d’aujourd’hui, et la trajectoire de demain. Le rapport remis à la tutelle y joue un rôle, pour dessiner ce futur. Cependant, la pandémie reste un facteur à prendre en compte.