1 Blu-ray Deutsche Grammophon 00440 073 685

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Succédant directement à la minimaliste production Roland Schwab, cousue main pour les incertitudes de la période Covid (et présentée deux étés seulement), le nouveau Tristan de Bayreuth, dû à Thorleifur Örn Arnarsson, redit les vertus de la narration par la scénographie, avec un esthétisme visuel qui nous convainc davantage que Lionel Esparza (voir O. M. n° 206 p. 43 d’octobre 2024). Le metteur en scène islandais sait notamment suggérer une atmosphère marine avec de simples cordages sur plateau nu, dans une imparable économie de moyens. L’occupation de l’immense espace du Festspielhaus s’appuie ensuite sur le décor de cale de navire du II, occupé par tout un bric-à-brac suggérant une plongée dans les souvenirs des protagonistes. Il ne sera ici question que du philtre de mort, que Tristan avale sans même combattre Melot, avant un III dévoilant l’ossature rongée de la cale façon carcasse de sauropode. Même sans direction d’acteurs inoubliable, la production respecte largement l’intégrité de l’œuvre, et surtout son ambiance mortifère.
Après son Parsifal fortissimo de 2023, Andreas Schager montre les mêmes moyens tout en prodiguant, au moins jusqu’au premier duo, de vraies nuances par-delà une émission cuivrée et assise, au troisième registre conquérant. Au point d’écraser un peu l’Isolde de Camilla Nylund, dans une immense robe couverte d’inscriptions et dont les restes de soprano lyrique – si et ut clairs, médium moins blindé que celui des « Hochdramatisch » – laissent une incarnation solide, amoindrie par un retour au III où l’émission plafonne jusque dans la « Liebestod ». Le Kurwenal mordant d’Ólafur Sigurdarson marque moins que la Brangäne maternelle de Christa Mayer, dont l’émission charnue, presque digne d’une Erda, enveloppe sa maîtresse avec dévotion et aigus ardents. Le roi Marke de Günter Groissböck, souvent filmé de loin tant le chanteur grimace, expose une belle étoffe mais manque un peu de rayonnement dans le haut registre, notamment à son retour à Karéol.
L’Orchestre du Festival de Bayreuth brille sous la direction sostenuto, à l’excellent brassage de cordes et aux tempi très modérés, de Semyon Bychkov, qui fait rougeoyer l’abîme mystique. Enfin, même si on aurait aimé davantage de plans larges, la captation de Michael Beyer propose des teintes noires – largement dominantes – profondes et parfaitement fondues.
YANNICK MILLON
Andreas Schager (Tristan) – Günther Groissböck (König Marke) – Camilla Nylund (Isolde) – Ólafur Sigurdarson (Kurwenal) – Birger Radde (Melot) – Christa Mayer (Brangäne) – Daniel Jenz (Ein Hirt) – Lawson Anderson (Ein Steuermann) – Matthew Newlin (Ein junger Seemann)
Bayreuther Festspielorchester, direction Semyon Bychkov. Mise en scène : Thorleifur Örn Arnarsson. Réalisation : Michael Beyer (16:9 ; PCM 2.0 ; DTS-HD Master Audio 5.0)
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