Opéras Plaisante Cenerentola à Paris
Opéras

Plaisante Cenerentola à Paris

05/10/2022
Opéra National De Paris/Julien Benhamou

Palais Garnier, 27 septembre

Cette Cenerentola, par laquelle Guillaume Gallienne, sociétaire de la Comédie-Française, débutait dans la mise en scène lyrique, ne nous avait guère convaincu, lors de sa création au Palais Garnier, en juin 2017 (voir O. M. n° 131 p. 64 de septembre). Mais elle nous avait fait meilleure impression, l’année suivante, grâce essentiellement à un plus beau plateau vocal, emmené par Marianne Crebassa, Lawrence Brownlee et Florian Sempey (voir O. M. n° 146 p. 56 de janvier 2019).

La présente reprise, sans infirmer notre impression d’une production laide et tristounette, fonctionne mieux encore. Car elle offre, sans doute, la meilleure distribution des trois séries, la plus homogène, en tout cas, emmenée par la direction sans histoire de Diego Matheuz, qui montre beaucoup de savoir-faire et d’élégance, en tenant d’une main de fer les ensembles.

Rien à redire des sœurs chipies, en principe confiées à deux membres de l’Académie de l’Opéra National de Paris, la mezzo Marine Chagnon et la soprano Martina Russomanno. Mais la défection de cette dernière, le 27 septembre, a contraint Chiara Skerath (Clorinda dans les deux séries précédentes) à la remplacer au pied levé, ce dont elle s’est acquittée avec brio.

Le plateau est dominé par Vito Priante, avec un baryton clair, velouté et mordant, une vocalisation et un canto sillabato impeccables. Pour un Dandini haut en couleur, mais jamais débraillé, avec même une pointe de second degré, faisant de sa cavatine d’entrée « Come un’ape » un grand moment de théâtre musical.

Le Don Magnifico, suprêmement chanté et caractérisé, de Carlo Lepore n’est pas en reste, et leur crépitant duo « Un segreto d’importanza », où chacun rivalise d’abattage sans jamais sacrifier la précision, est un des sommets de la soirée. On sait gré, également, à Guillaume Gallienne d’avoir renoncé au pénible strip-tease qu’il imposait à Don Magnifico, pendant son premier air.

Troisième voix grave, l’Alidoro de Luca Pisaroni ne se situe pas au même niveau, malgré l’autorité que lui confèrent sa haute stature et son solide baryton-basse. Le superbe « Là del ciel » le trouve peu à l’aise, avec des vocalises bousculées et quelques aigus blancs.

Dmitry Korchak est crédible scéniquement, et vocalement performant : une colorature hardie et un suraigu percutant le font triompher des chausse-trappes de « Si, ritrovarla io giuro ». On regrette toutefois des ut non dénués de brutalité, donnés toujours con tutta forza : davantage de souplesse et de clair-obscur dans l’émission permettrait, sans doute, de dessiner un Don Ramiro plus nuancé.

Enfin, prise de rôle réussie pour Gaëlle Arquez, qui avait, toutefois, abordé Angelina dès 2014, en concert, au Festival de Beaune. Elle impose une Cenerentola moins fragile physiquement que Marianne Crebassa – on a un peu de mal à l’imaginer en souffre-douleur de sa famille ! –, mais tout aussi fascinante vocalement, en vertu d’un mezzo pulpeux et ductile, au grave riche et à la vocalise déliée, déparé seulement par quelques petites crispations dans l’aigu, notamment dans son rondo final.

La reprise, plutôt plaisante, d’une production assez ratée.

THIERRY GUYENNE


© Opéra National De Paris/Julien Benhamou

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