Opéras Mitridate à Montpellier
Opéras

Mitridate à Montpellier

23/04/2025
Hongni Wu, Lauranne Oliva, Levy Sekgapane et Marie Lys. © Marc Ginot

Opéra Comédie, 12 avril

Le mémorable Mitridate de Mozart mis en scène par Emmanuelle Bastet à Lausanne en mars dernier (voir O. M. n° 211 p. 49 d’avril) conserve toute son intensité à l’Opéra Comédie de Montpellier, son coproducteur. Bien que la distribution ait été en majeure partie renouvelée – seuls trois interprètes demeurent issus du plateau originel –, la production affirme, avec une éloquence toujours vive, ses partis pris dramaturgiques et esthétiques. D’une rare limpidité et d’une grande poésie, le travail de mise en scène mérite assurément d’être salué à nouveau. En recentrant le propos sur la dimension psychologique plutôt que sur les enjeux pseudo-géopolitiques du livret, Bastet met en lumière, avec une acuité remarquable, la complexité affective de chaque protagoniste, laissant affleurer failles, tourments et élans les plus intimes. La scénographie de Tim Northam s’adapte elle aussi avec fluidité aux volumes d’un autre théâtre. Toujours aussi envoûtante dans ses saturations bleutées évolutives et ses sobres structures en escalier, elle impose, par la retenue de ses moyens, un recentrage subtil sur le déroulement de l’action et les figures héroïques.

Le changement de distribution à Montpellier modifie nécessairement le rendu vocal et le jeu des timbres. Lauranne Oliva, inoubliable Aspasia à Lausanne, enfile cette fois les habits plus légers d’Ismene avec une aisance bluffante (divin « So quanto a te dispiace »), offrant à Marie Lys l’occasion d’affirmer à son tour sa personnalité : véhémente sur « Al destin, che la minaccia », nuancée sur « Pallid’ombre ». Dans le rôle-titre, Levy Sekgapane séduit par son extrême ductilité vocale. Son timbre, un brin nasal et plus rossinien que mozartien, n’entrave en rien sa maîtrise des périlleux écarts du fameux « Se di lauri ». Sifare revient ici au contre-ténor américain Key’mon Murrah, dont la voix souple et expressive – magique « Lungi da te » – donne vie à une incarnation saisissante. Malgré une technique assurée, la voix un peu terne de Hongni Wu peine à trouver toute la profondeur dramatique attendue du rôle de Farnace. Déjà applaudis à Lausanne, Remy Burnens (Marzio) et Nicolò Balducci (Arbate) donnent, pour leur part, un relief accru à leurs incarnations. À la tête d’un Orchestre national Montpellier Occitanie très réactif, Philippe Jaroussky cisèle une direction aux contrastes raffinés, jouant avec brio des dynamiques et des couleurs pour hisser ce Mitridate montpelliérain à un niveau d’excellence.

CYRIL MAZIN

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