Opéra Comédie, 11 mars
Après avoir été étrennée à l’Opéra-Comique en février dernier (voir O. M. n° 211 p. 61 d’avril), revoici la Médée de Cherubini selon Marie-Ève Signeyrole, cette fois à l’Opéra Comédie de Montpellier. La mise en scène n’a guère été modifiée d’un théâtre à l’autre. On retrouve les mêmes gifles, les mêmes chaises culbutées, les mêmes vidéos importunes (Betty Boop !), les mêmes ajouts de textes fâcheux et toujours ce personnage assis, dans une prison, pour nous rappeler que les passions d’hier sont aussi celles d’aujourd’hui.
La distribution elle aussi est la même, à l’exception des deux suivantes de Dircé, qui sont ici deux membres du Chœur de l’Opéra National de Montpellier : Natalia Ruda, à l’étonnante voix de contralto, et Jennifer Michel. Les solistes ont un peu travaillé leur manière de dire les dialogues, mais ne s’improvise pas tragédien qui veut. Vocalement, chacun fait preuve des mêmes qualités. La dignité d’Edwin Crossley-Mercer contraste toujours avec l’agitation de Julien Behr, dont on aimerait une incarnation plus nuancée de Jason et des aigus moins tirés. Lila Dufy (Dircé) n’est pas toujours très à l’aise dans son air « Hymen ! viens dissiper une vaine frayeur », et Joyce El-Khoury nous a paru un peu fatiguée, même si sa Médée est peut-être plus véhémente, plus rongée de l’intérieur qu’à l’Opéra Comique.
Le meilleur moment de la soirée, vocalement, demeure l’air de Néris, « Ah, nos peines seront communes », toujours aussi splendidement interprété par Marie-Andrée Bouchard-Lesieur, avec un basson un peu moins présent qu’à l’Opéra Comique. Car c’est ici l’Orchestre National de Montpellier qui est dans la fosse, excellente formation toutefois privée de la rugosité des instruments historiques utilisés par l’Insula Orchestra. Plus souple, moins tranchée que celle de Laurence Equilbey, la direction de Jean-Marie Zeitouni gagne moins en frénésie au fil des actes, et reste un beau tapis sonore sur lequel s’épanouissent les voix. Le chœur (préparé par Noëlle Gény) est à son affaire, mais n’évolue pas sur scène avec davantage d’assurance qu’Accentus ; les scènes de violence avec les soldats n’en sont que plus approximatives. Médée n’a pas encore tout à fait trouvé son assise.
CHRISTIAN WASSELIN