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L’Arlésienne & Le Docteur Miracle à Paris

29/05/2025
Dima Bawab, Thomas Dolié, Héloïse Mas, Marc Mauillon et Pierre Lebon. © Thomas Amouroux

Théâtre du Châtelet, 24 mai

Fin de tournée pour ce spectacle Bizet promu par le Palazzetto Bru Zane pour les 150 ans du décès du compositeur et créé à Tours en octobre dernier (voir O. M. n° 207 p. 70 de novembre 2024). Unir L’Arlésienne et ses vingt-sept numéros destinés à accompagner à la scène la longue et triste pièce de Daudet, et Le Docteur Miracle, amusante pochade de concours (gagné haut la main et à égalité avec Lecocq) tient de la gageure, d’autant que leur rapprochement montre surtout combien, à quinze ans de distance, l’art d’orchestrateur du compositeur a gagné en raffinement.

La force de la première partie de ce diptyque un peu forcé, mais assurément réussi, tient donc d’abord à la fosse, d’autant que Sora Elisabeth Lee, déjà admirée dans le triptyque Hindemith-Bartók-Honegger qui ouvrait la saison de Nancy en octobre dernier (voir O. M. n° 207 p. 59 de novembre 2024) tient ici la baguette de -l’Orchestre de Chambre de Paris avec un vrai sens dramatique et un art des atmosphères particulièrement réussi pour les nombreux tableaux de genre du conte musical qu’on ne croise guère que dans les suites orchestrales qu’en ont tiré Bizet et Guiraud. L’adaptation du drame, au travers d’un récit – encore un peu long – porté par Eddie Chignara, permet à l’œuvre de tenir la scène sous les ailes d’un vieux moulin délabré et machiniste, tout droit emprunté à l’univers ludique de Jean Tinguely.

Danseurs délicats, chœurs formés des quatre solistes de l’« opéra-comique » qui suit, mise en scène subtile de Pierre Lebon, qui interprète aussi le rôle muet de l’Innocent, c’est ici le moyen de découvrir l’œuvre dans des conditions idéales, qui sont réunies tout autant pour le plus traditionnel Docteur Miracle, installé sous le castelet d’un charlatan où un podestat parfaitement ridicule sera berné par sa fille et le militaire qu’elle aime. Dima Bawab, espiègle et joliment timbrée et Héloïse Mas, voix corsée et pleine, abattage idéal, étaient de la création – on renvoie à l’article de José Pons à leur sujet. Thomas Dolié, gros ventre et petit chapeau, a un sens du ridicule achevé, et de belles couleurs graves, Marc Mauillon a lui le torse bombé vocal des militaires d’opérette, joliment agrémenté de couleurs lumineuses.

Le tout est mené tambour battant par Pierre Lebon, qui a choisi le rouge comme dominante colorée d’une action pimpante et endiablée, et par Sora Elisabeth Lee qui trouve le moyen de donner de la délicatesse à une orchestration enlevée, faite d’abord pour briller. Soirée épatante.

PIERRE FLINOIS

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