Opéras La Somnambule s’éveille à Nice
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La Somnambule s’éveille à Nice

08/11/2022
© Dominique Jaussein

Opéra, 4 novembre

Cette production de La sonnambula, signée Rolando Villazon, nous avait laissé partagé, lors de sa création, au Théâtre des Champs-Élysées, en juin 2021 (voir O. M. n° 175 p. 63 de septembre). Nous continuons à trouver du sens à situer l’action dans une communauté religieuse, repliée sur elle-même, ennemie de toute joie et hostile aux étrangers, mais aussi à regretter que le finale – célébrant ici le mariage entre Elvino et Lisa, tandis qu’Amina se fait la malle ! – soit en si flagrante contradiction avec le livret, comme avec la musique.

Au moins, à Paris, un couple d’amoureux mal apparié de timbre, de chant, et même de posture physique (Pretty Yende/Francesco Demuro), allait dans le sens de cette lecture iconoclaste. À l’Opéra Nice Côte d’Azur, avec un plateau presque entièrement renouvelé et infiniment plus belcantiste, le spectacle – repris par Jean-Michel Criqui – fonctionne moins bien, mais distille, sur le plan musical, des plaisirs grisants. À commencer par la direction amoureuse de Giuliano Carella, à la fois poétique et théâtrale, ciselée dans le moindre détail, attentive à chaque respiration et au plus léger rubato des chanteurs.

Le trio principal, en prise de rôle, est de haut vol. Sans doute Rodolfo n’offre-t-il pas à Adrian Sampetrean beaucoup d’occasions de briller ; mais on retrouve le velouté de sa basse chantante, avec un splendide « Vi ravviso, o luoghi ameni », à fleur de mots et caressant de ligne, pour un personnage profondément humain et émouvant.

Edgardo Rocha offre à Elvino son timbre lumineux et son aisance à soutenir des tessitures très aiguës, avec des demi-teintes extatiques dans « Prendi, l’anel ti dono ». Surtout, le ténor uruguayen sait admirablement marier ses phrasés avec ceux de sa partenaire, dans un « Son geloso del zefiro errante » absolument magique : difficile, alors, de comprendre comment pareille entente peut brutalement cesser à la fin de l’opéra, comme le veut la mise en scène !

Il faut dire que Sara Blanch fait assaut de charme et d’élégance. Ravissante en scène, la soprano espagnole incarne une Amina toute de juvénile sensualité à son entrée, qui sait se muer en noir désespoir pour un bouleversant « Ah ! non credea mirarti », phrasé à la corde, avant de laisser éclater sa joie dans un jubilatoire « Ah ! non giunge », couronné d’un éclatant contre-fa. La voix, sans posséder le sex-appeal de celle de Pretty Yende – mais avec bien plus de précision dans l’intonation et la virtuosité ! –, est jolie, très bien émise et projetée, agréablement fruitée dans le médium, avec un superbe aigu, rond et facile.

Dans le rôle trop souvent sacrifié de Lisa, Cristina Giannelli aborde les fioritures de ses deux airs avec sûreté et franchise, à défaut, peut-être, d’en avoir toute la légèreté. Le plateau est complété par le solide Alessio de Timothée Varon, aux côtés de la Teresa inchangée d’Annunziata Vestri.

THIERRY GUYENNE


© Dominique Jaussein

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