Opéras La Cenerentola à Bad Wilbdad
Opéras

La Cenerentola à Bad Wilbdad

05/09/2025
Patrick Kabongo, Emmanuel Franco, Polina Anikina et Filippo Morace. © Rossini in Wildbad/Patrick Pfeiffer

Kurtheater, 25 juillet 

On ne change pas une équipe qui gagne, et c’est avec plaisir et une attente aiguisée que l’on attendait celle de la nouvelle production de La Cenerentola, la première in loco depuis 2010, réunissant quelques-uns des meilleurs éléments de L’Italiana in Algeri de 2024 (voir O. M. n° 206 p. 42 d’octobre), à commencer par le rôle-titre.

En Angelina, la toute jeune mezzo Polina Anikina y domine de nouveau de sa longue silhouette une distribution d’excellent niveau. Avec sa voix longue au médium richement timbré, sa conduite du chant impeccable, son art de la vocalise – à quelques aigus tirés près dans son rondo final –, elle compose une héroïne d’une parfaite candeur, sans mièvrerie, crédible de son apparition au prologue faisant la charité à Alidoro déguisé en mendiant, jusqu’au finale où elle le fait asseoir sur le trône qu’elle vient de refuser. La basse Dogukan Özkan (Mustafà l’année dernière) ne paraît pas encore tout à fait au point pour le grand air d’Alidoro où la souplesse lui fait défaut et dont la partie vocalisante le met à rude épreuve, mais il s’impose largement dans le reste du rôle.

Emmanuel Franco offre en Dandini l’une des compositions extravagantes dont il a le secret, d’une faconde et d’une invention irrésistibles, maîtrisant à la perfection le juste équilibre entre humour théâtral et exigence vocale, dans un rôle où la projection et la virtuosité sont absolument nécessaires. Nouveau venu, la basse bouffe Filippo Morace se révèle absolument idéal en Don Magnifico dont il concrétise avec brio le caractère ambigu dans un mélange de ridicule et de férocité perverse, notamment lorsqu’il menace Cenerentola au premier acte ou rudoie ses propres filles. Volontairement ou pas, la mise en scène ajoute à sa méchanceté une petite touche libidineuse qui renforce le caractère inquiétant de son personnage.

Au lendemain de sa performance dans une tessiture nettement plus large que celle de Ramiro, Patrick Kabongo semble un peu en retrait et met un petit temps à retrouver le placement naturel de sa voix qui paraît moins libre et moins brillante. S’il ne manque ni d’élégance ni d’expressivité, il faut attendre son grand air de l’acte II pour qu’elle s’épanouisse de nouveau dans toute la gamme de ses possibilités. Deux excellentes élèves de l’Académie assument le rôle des vilaines sœurs, et le chœur masculin partagé entre bons et mauvais garçons apporte une contribution tout à fait convaincante.

Relégué dans la petite fosse et les loges d’avant-scène, l’Orchestre Philharmonique Szymanowski de Cracovie donne une exécution de bon aloi sous la baguette parfois un peu trop pressée de José Miguel Pérez-Sierra. La mise en scène de Jochen Schönleber, très stylisée, avec un minimum d’accessoires, se concentre surtout sur le jeu d’acteur, enrichissant un décor à transformation plutôt sommaire de petites touches de vidéo pour une lecture assez fine et très évidente de cet opéra qui « marche » très bien tout seul.

ALFRED CARON

Pour aller plus loin dans la lecture

Concerts et récitals Amazilia à Fano

Amazilia à Fano

Opéras Un avvertimento ai gelosi à Bad Wildbad

Un avvertimento ai gelosi à Bad Wildbad

Concerts et récitals Michael Spyres à Ravello

Michael Spyres à Ravello