Opéras Il trovatore à Marseille
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Il trovatore à Marseille

13/06/2025
Şerban Vasile, Angélique Boudeville, Teodor Ilincăi et Laurence Janot. © Christian Dresse

Opéra, 5 juin

Pour achever en beauté sa saison du centenaire, l’Opéra de Marseille reprend, en coproduction avec l’Opéra de Saint-Étienne, Il trovatore dont nous avions rendu compte (voir O. M. n° 199 p. 99 de février 2024). La mise en scène de Louis Désiré demeure plus allusive que narrative. Mais la narration, moteur essentiel du drame, deux grands artistes l’assument.

Pour comprendre l’intrigue, il suffit d’écouter le récit de Ferrando, « All’erta! All’erta!…Di due figli ». Patrick Bolleire, voix et stature imposantes, détaille les gruppetti d’« Abbietta zingara ». Pourquoi faut-il que son ample houppelande abrite deux pantins censés figurer les fils du Comte ? Verdi voulait intituler son opéra « Azucena ». Avec Aude Extrémo, c’est une évidence, la gitane est le personnage principal. Les deux récits hallucinés (« Stride la vampa » et « Condotta ell’era in ceppi ») impressionnent par l’homogénéité sur toute l’étendue, la projection, la diction. Le sommet, elle l’atteint au dernier acte en murmurant, rêve exalté, « Ai nostri monti ». Autre évidence, Șerban Vasile a la voix du baryton sombre et sonore que requiert le rôle de Luna. Incisif dans les affrontements, il délivre un legato stylé dans l’aria « Il balen del suo sorriso ».

Le rôle-titre trouve en Teodor Ilincăi un ténor qui n’esquive aucun aigu, y compris le fameux contre-ut facultatif de « Di quella pira ». On attendrait plus de tendresse élégiaque pour « Ah! sì, ben mio » et l’hymne nuptial (« L’onda de’suoni mistici »). Angélique Boudeville, pas toujours intelligible au premier acte, offre un noble « D’amor, sull’ali rosee », un « Miserere » ardent et un legato pianissimo dans la scène finale. Laurence Janot, Ines devenue carmélite, donne beaucoup d’intensité à son rôle. Marc Larcher, Arnaud Hervé et Norbert Dol servent efficacement la progression de l’action.

En dépit des conditions (costumes, accessoires) qui leur sont faites, les chœurs préparés par Florent Mayet s’imposent vaillamment comme un personnage décisif, qu’il s’agisse des Bohémiens (sans marteaux ni enclumes) ou des soldats (coiffés de bonnets de police et armés de tabourets). Les lumières de Patrick Méeüs jouent habilement des contrastes et sauvent ce qui peut l’être de panneaux mobiles et de linges alternativement blancs et rouges. Le rythme, l’élan imprimés à l’Orchestre de l’Opéra de Marseille par Michele Spotti soulèvent une salle comble qui acclame le romantisme.

PATRICE HENRIOT

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