Opéras Adina rafle la mise à Bad Wildbad
Opéras

Adina rafle la mise à Bad Wildbad

24/08/2022
© Patrick Pfeiffer

Kurtheater, 24 juillet

Avec Adina – achevée en 1818, mais créée en 1826 seulement, à Lisbonne –, Jochen Schönleber signe, en collaboration avec le baryton mexicain Emmanuel Franco, la production la plus réussie de l’édition 2022 du Festival et, sans doute, la meilleure jamais vue de cette « farsa » aux origines mystérieuses.

Dans un style conciliant les aspects comiques et sentimentaux d’un livret plus profond qu’il n’y paraît, la mise en scène, presque sans décor, joue de quelques accessoires. Elle arrache l’intrigue à la banalité des conventions du genre, en se concentrant entièrement sur les personnages, qu’elle dessine avec beaucoup de finesse et d’humour.

Du Calife, incarné de façon magistrale par Emmanuel Franco, le spectacle fait une sorte de dictateur à la Fidel Castro mais, au-delà de la caricature, sait en révéler les multiples facettes, du potentat amoureux au père secret de l’héroïne. La soprano espagnole Sara Blanch donne beaucoup de relief aux ambivalences d’Adina et brille par sa maîtrise de la difficile colorature, à laquelle elle confère une riche expressivité.

Le Vénézuélien César Arrieta paraît absolument idéal pour la tessiture de tenore di grazia de Selimo, avec un legato parfait et une pointe de bravoure, lorsque le rôle le réclame. La solide basse du Chinois Shi Zong – Mustafà, jardinier complice du jeune couple – sait s’assouplir pour se joindre à eux dans un trio, dû à Pacini, qui semble démarquer celui, fameux, d’Il barbiere di Siviglia, dans un style nettement plus romantique.

En Ali, le ténor britannique Aaron Godfrey-Mayes joue, avec malice, son personnage de secrétaire technocrate, offrant tout l’esprit voulu à son petit air légèrement misogyne. Le chœur masculin incarne, avec un plaisir évident et une belle homogénéité, les esclaves du Calife, divisés ici entre ouvriers corvéables à merci et paparazzi occupés à noter la moindre pensée du tyranneau, voire à relayer les affres de sa vie personnelle.

L’ensemble doit beaucoup à la direction très vivante de Luciano Acocella, à la tête des membres de l’Orchestre Philharmonique de Cracovie, toujours au même niveau d’excellence, après cinq jours consécutifs où ils ont été dans la fosse.

Un enregistrement de cette perle musicale et théâtrale devrait paraître en DVD.

ALFRED CARON


© Patrick Pfeiffer

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