Coproduit avec Cologne et Monte-Carlo, filmé à Madrid, en février 2018, le spectacle, dans sa forme originelle (2008), était passé par le Théâtre du Châtelet, en 2013, avec une sonorisation absurde et dommageable (voir O. M. n° 82 p. 61 de mars). Le vaste plateau du Teatro Real permet son déploiement sur une plus grande échelle, l’orchestre étant aussi, à juste titre, replacé en fosse. Enfin, l’excellente réalisation de Jérémie Cuvillier valorise considérablement la mise en scène de John Fulljames.

Avec les nouveaux très beaux éclairages (James Farncombe), et une haute qualité d’image, on est devant un véritable film qui, tout en respectant la réalité de la scène, fouille la personnalité des quatre principaux personnages de Street Scene (Philadelphie, 1946). Drames et passions individuelles, profonde humanité et tendresse, ressortent ici prioritairement de la partition, qui est bien celle d’un véritable opéra, et non d’un « musical » pour Broadway.

La distribution, sous la conduite efficace de Tim Murray, est dans l’ensemble satisfaisante, dominée par la Rose Maurrant de Mary Bevan, aussi séduisante qu’émouvante. Solides parents, avec le puissant Frank de Paulo Szot, d’une impressionnante véhémence dans ses invectives racistes, et l’Anna de Patricia Racette, avec pourtant un vibrato de l’aigu nettement trop marqué.

De beau timbre, Joel Prieto, vrai ténor d’opéra, n’est pas parfaitement juste dans son arioso (« Lonely House »), mais il rétablit ensuite les choses, et il a l’élégance et la séduction requises pour Sam Kaplan. Parmi les très nombreux comprimari, l’Emma Jones de Lucy Schaufer mène l’action avec un bel abattage.

Les parfaits chœurs du Teatro Real et ceux d’enfants de la Jorcam complètent, pour un DVD qui surclasse le seul disponible jusqu’ici (Arthaus Musik).

FRANÇOIS LEHEL

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