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Une Bohème au cœur des tourments de la jeunesse éternelle à Bilbao

30/05/2024
Celso Albelo (Rodolfo) et Miren Urbieta-Vega (Mimi). © E. Moreno Esquibel

Palacio Euskalduna, 18 mai

« La Bohème n’est pas de moi, mais de Puccini ; tout comme l’auteur de Rigoletto, c’est Verdi », confie avec humour Leo Nucci, qui met en scène,  pour clôturer la saison 2023-2024 de l’ABAO Bilbao Opera, le premier ouvrage dans l’immense auditorium du Palacio Euskalduna, en coproduction avec le Teatro Comunale de Modène et la Fondazione Teatri di Piacenza.

Nulle transposition spatiale ou temporelle, donc, mais le souci de revenir à Henri Murger (Scènes de la vie de bohème) et aux « scènes lyriques » de Luigi Illica & Giuseppe Giacosa, afin d’aller au cœur des tourments de la jeunesse éternelle.

La direction d’acteurs de Leo Nucci sait habiter tous les rôles. Le cénacle d’artistes alterne ballets et duels, festins et fringales. Chaque geste a sa raison, bien au-delà des didascalies, individualisant, au II, passants, bourgeois, soldats, étudiants, midinettes, boutiquiers, jongleurs, garçons de café, et enfants.

Les décors de Carlo Centolavigna, les costumes d’Artemio Cabassi, les lumières de Claudio Schmid témoignent d’un travail d’équipe. Comment oublier la soudaine lumière du jour naissant, lorsque Mimi expire, sur un ultime « dormire » ?

Ses sons filés, une impeccable messa di voce et un instrument ample permettent à Miren Urbieta-Vega de créer une superbe Mimi, alliant la délicatesse à la passion des adieux. Sa mort atteint aux sommets du lyrisme puccinien.

Celso Albelo réussit, d’entrée de jeu, un très pur « Che gelida manina », et une brillante fin du duo. Son personnage de poète querelleur et jaloux ménage des instants poignants dans le quatuor « Addio, dolce svegliare », et son désespoir final confirme une spectaculaire reconversion dans Puccini – issu du bel canto, le ténor espagnol a abordé Rodolfo, en février dernier, à Venise, puis Pinkerton (Madama Butterfly), en mars, à São Paulo.

Marina Monzo incarne une Musetta fine et nuancée. Manel Esteve et José Manuel Diaz, barytons complémentaires, David Lagares, basse sonore, Fernando Latorre, jouant et chantant Benoît, puis Alcindoro, avec son aplomb de basse bouffe, complètent cette distribution sans faille.

Il faut louer, aussi, la précision des chœurs (Coro de Opera de  Bilbao), préparés par Boris Dujin, et encore l’entrain de la maîtrise (Leioa Kantika Korala), enfants turbulents qui escortent Parpignol.

Pedro Halffter imprime à l’orchestre (Bilbao Orkestra Sinfonikoa), dans des tempi toujours attentifs aux solistes, une vigueur et une rigueur qui font progresser l’action dramatique. Sa direction musicale vit.

PATRICE HENRIOT

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