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Stéphanie d’Oustrac, éblouissante Agrippina à Amsterdam

26/01/2024
Stéphanie d'Oustrac (Agrippina). © Dutch National Opera/Ben van Duin

De Nationale Opera, 13 janvier

Avec quelques mois de retard, dus aux circonstances sanitaires que l’on devine, la coproduction d’Agrippina, dévoilée au Bayerische Staatsoper de Munich, en juillet 2019 (voir O. M. n° 143 p. 41 de septembre), et reprise, peu après, au Covent Garden de Londres, avant d’entrer au répertoire du Staatsoper de Hambourg, arrive, enfin, au DNO d’Amsterdam. Plaisir de retrouver les qualités (substantielles) et les faiblesses (mineures) du spectacle de Barrie Kosky, décrites, à la création, par Laurent Barthel, mais aussi, et surtout, de découvrir une distribution presque entièrement renouvelée.

En tête de plateau, Stéphanie d’Oustrac réussit une éblouissante prise de rôle : son Agrippina est, tour à tour, sensuelle, impitoyable, machiavélique, incestueuse, drôle, mordante, et parfois même touchée par le doute. Si elle prend un plaisir manifeste à incarner le personnage sous toutes ses facettes, en s’adaptant aussi aisément à chaque scène qu’elle enfile les costumes multiples et diversifiés conçus par Klaus Bruns, la performance vocale force le respect.

Timbre idéalement homogène et charnu dans tous les registres, intonation parfaite, rigueur rythmique, souplesse des phrasés, projection impressionnante – nonobstant un plateau immense et un décor en tubulures, qui ne renvoie pas vraiment les voix vers la salle –, la mezzo française domine les coloratures avec autorité, dès « L’alma mia fra le tempeste », autant qu’elle bouleverse, dans le désarroi de « Pensieri, voi mi tormentate ».

À ses côtés, la Poppea de Ying Fang semble forcément plus classique, voire assez terne. Même sans avoir un tel abattage scénique, la soprano chinoise n’en signe pas moins une prestation éminemment solide et fiable. Habitué du spectacle – il incarnait, déjà, le rôle, à Munich et Londres –, Gianluca Buratto campe un Claudio efficace, bien qu’un peu plébéien, et manquant parfois de puissance dans le grave, comme si un diapason trop abaissé lui était défavorable.

La qualité du plateau se révèle, encore, dans l’excellente complémentarité des deux contre-ténors : l’Ottone sombre et intense de Tim Mead, et le Nerone, à la fois angélique et brillant, de John Holiday, voix ronde de sopraniste, formée autant par le jazz que par le classique – avec, en outre, une aisance scénique aguerrie, notamment par sa participation à l’édition américaine de l’émission The Voice !

Dans la fosse, l’orchestre Accademia Bizantina apporte un soutien solide aux solistes, bien que les vents s’égarent parfois, et que la direction musicale d’Ottavio Dantone puisse sembler un peu routinière.

NICOLAS BLANMONT

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