Opéra, 30 avril
Créée à l’Opéra de Marseille, en mars 2019 (voir O. M. n° 150 p. 47 de mai), cette production des Nozze di Figaro, signée Vincent Boussard, déconcerte toujours autant, non seulement par son manque de lisibilité et d’énergie, mais aussi par son esthétique velléitaire. Ni réellement conceptuelle, ni vraiment traditionnelle, l’approche du metteur en scène français déçoit, en effet, par son inaptitude à stimuler la mécanique, pourtant bien huilée, de ce bijou de la « trilogie Mozart/Da Ponte ».
Les talents d’acteur de la distribution ne sont, cependant, pas à remettre en cause : chacun mobilise ses ressources avec brio. Et le plaisir vocal est au rendez-vous. La Comtesse de Patrizia Ciofi est toujours aussi touchante : ses deux airs isolent un contrôle du souffle superbe et un legato captivant. On pourra, tout au plus, regretter que la voix semble se voiler dans certains récitatifs.
À ses côtés, le Comte de Jean-Sébastien Bou se montre, lui aussi, très convaincant. Dès son entrée, il livre une incarnation franche, sonore et d’une belle autorité. Dans leur brillant sillage, le couple de serviteurs ne démérite guère.
Hélène Carpentier incarne une Susanna merveilleusement chantante, tandis que Robert Gleadow confère à son Figaro, une bonhomie exempte de toute forfanterie. Le Cherubino d’Eléonore Pancrazi séduit, lui aussi, par son naturel, même s’il lui manque une once d’ambiguïté.
En Barbarina, la belle voix d’Amandine Ammirati semble un peu surdimensionnée – ainsi, « L’ho perduta » sonne-t-il un rien inhabituel, voire factice. Rien de tel concernant la Marcellina de Mireille Delunsch : maîtresse de ses pointes, elle emporte l’adhésion par son inaltérable charisme. Enfin, les barytons-basses Frédéric Caton et Philippe Ermelier, comme les ténors Raphaël Brémard et Carl Ghazarossian, rivalisent d’aisance et offrent le meilleur d’eux-mêmes.
Dans la fosse, le travail du chef italien Michele Spotti sur la partition se révèle, quant à lui, admirable. A-t-on jamais entendu l’Orchestre de l’Opéra de Marseille sonner avec autant d’assurance dans Mozart ? Sous la direction dynamique, vive, précise et altière de son nouveau directeur musical, il peut, désormais, affirmer pleinement ses plus belles aptitudes dans les œuvres de la période classique.
CYRIL MAZIN