Opéras Le Comte Ory enfin à Québec
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Le Comte Ory enfin à Québec

12/11/2024
Florence Bourget (Isolier), Phiippe Talbot (Le Comte Ory) et Judith Fa (La Comtesse Adèle). © Michel Gagné

Grand Théâtre, 26 octobre

Jean-Romain Vesperini et Laurent Campellone sont devenus, chacun de son côté, des valeurs sûres de l’Opéra de Québec, à l’arrivée du baryton canadien Jean-François Lapointe à la direction générale et artistique de l’institution, en septembre 2020. Le premier y a, depuis, mis en scène Faust et La Vie parisienne, alors que le second s’est vu confier la direction musicale de Don Pasquale, Roméo et Juliette et Lucie de Lammermoor.

Ces deux piliers sont réunis pour la première fois, ici et dans leur carrière, pour Le Comte Ory, ouvrage jamais présenté à Québec, depuis sa création (Paris, 1828). On saluera, en premier lieu, le travail de Laurent Campellone. Comme dans les œuvres déjà citées, le chef français parvient à inculquer le sens du style à un Orchestre Symphonique de Québec en très belle forme. Sa direction vive privilégie la transparence, allège les fins de phrases, tempère les volumes.

On ne saurait, à cet égard, imaginer ce qu’il adviendrait de Judith Fa, s’il ne contrôlait pas aussi bien les masses sonores. La soprano française a le timbre et la technique de la Comtesse Adèle, mais, curieusement, le volume est fluctuant, comme si les nuances n’étaient pas toujours soutenues.

Le verdict varie, ainsi, selon les scènes, alors que, pour la Ragonde de Julie Pasturaud, il dépend des actes. Très moyenne, au I, la mezzo française cadre brillamment ses paramètres vocaux, au II.

Leur compatriote Philippe Talbot – ténor lumineux et léger, rôle impeccablement maîtrisé – est à l’aise en Comte Ory, dont il possède, aussi, l’abattage scénique nécessaire. Les deux interprètes les plus impressionnants du plateau n’en sont pas moins les Canadiens Florence Bourget, en Isolier, et Jean-Kristof Bouton, en Raimbaud.

Depuis sa sortie de l’Atelier Lyrique de l’Opéra de Montréal, en 2020, la mezzo-soprano fait, par sa présence, la justesse de son placement vocal et son instinct artistique, un sans-faute. Quant au baryton, il se montre parfait d’aplomb.

On pouvait attendre de l’autorité de la part de Julien Véronèse, dans le rôle du Gouverneur. Nous l’avons eue, même si la vivacité et le tempérament rossinien du baryton-basse français méritent d’être revus une autre fois, contrairement à la soprano canadienne Émilie Baillargeon, que l’on n’a pas manqué de remarquer, dans la modeste partie d’Alice.

Et le trio formé par Jean-Romain Vesperini, son décorateur, Bruno de Lavenère, et son costumier, Alain Blanchot ? Il choisit de miser sur le burlesque, le metteur en scène français citant même les Monty Python, dans sa note d’intention. Au fond, personne n’est dupe de rien et attend la première occasion de s’adonner aux joyeux plaisirs, dans un monde de faux-semblants, cadré par des toiles peintes et du carton-pâte.

Le Comte Ory en ermite, au I, est une sorte de Prolix (Le Devin), déboulant en slip rouge au village d’Astérix. Lorsqu’il entre dans une sorte de transe, il fait fondre ces dames. Quant à la scène où « Sœur Colette » se glisse dans le lit de la Comtesse Adèle, mais finit par embrasser Isolier, elle est davantage un « plan à trois » emberlificoté qu’un moment drôle.

Sans être le chef-d’œuvre de Jean-Romain Vesperini, à l’Opéra de Québec, l’ensemble est assez réussi, par le rythme théâtral et musical, et le cadre toujours astucieux.

CHRISTOPHE HUSS

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