Théâtre Royal, 21 novembre
Après très exactement vingt ans d’absence, Les Contes d’Hoffmann retrouvent l’affiche de l’Opéra Royal de Wallonie-Liège, cette fois dans la production montée par Stefano Poda, à l’Opéra de Lausanne, en septembre-octobre 2019 (voir O. M. n° 155 p. 42 de novembre). Elle se distingue par son esthétisme, ainsi que ses nombreuses références à l’œuvre du « vrai » E. T. A. Hoffmann.
Dans le rôle principal, Arturo Chacon-Cruz possède bien des atouts. Il fait entendre un instrument lumineux, qui s’épanouit particulièrement dans le haut médium et l’aigu. Il apporte aussi une couleur intéressante aux ensembles, notamment lorsque le timbre se mêle à ceux, plus sombres, de Miracle et Crespel, dans l’acte d’Antonia.
La diction pourrait être plus claire, mais le ténor mexicain soigne l’expressivité du personnage. Il est, surtout, très engagé physiquement et dramatiquement, comme dans les scènes où, enfermé dans un décor tournant, Hoffmann marche aux murs et au plafond de sa chambre.
À ses côtés, il incombe à Jessica Pratt d’interpréter les « trois femmes dans une même femme », qui obsèdent le poète. Un pari difficile à relever, et dont la soprano anglo-australienne se tire d’une manière inégale.
Après quelques problèmes d’intonation, elle donne à son Olympia des suraigus impressionnants, mais reste une poupée très éthérée, laissant la voix dans une forme de réserve, dont elle peine à sortir, en Antonia. Certes délicate, elle y manque de rondeur et de projection pour pleinement convaincre. Giulietta, de ce point de vue, lui va beaucoup mieux : ici, son soprano s’épanouit vraiment, et le personnage est incarné.
Dans les quatre figures diaboliques, Erwin Schrott ne manque pas d’éclat et multiplie les facéties, en complicité avec le public. On regrette que son français, aux voyelles trop assombries, ne soit pas totalement compréhensible, car le baryton-basse uruguayen fait preuve d’une grande expressivité et d’une réelle intelligence du texte. Et le timbre est magnifique (superbe « Scintille, diamant » !).
Dans la romance « Vois sous l’archet frémissant », Julie Boulianne fait entendre un beau lyrisme, grâce à un mezzo dense et profond, qui nourrit son portrait de la Muse/Nicklausse, tout au long de la représentation.
Parmi les seconds rôles, on remarque, tout particulièrement, le Spalanzani de Valentin Thill, impeccable à tous points de vue. On retient, également, les solides prestations de Vincent Ordonneau, Julie Bailly et Roger Joakim. Si l’on a connu, dans cette œuvre, des chœurs d’un impact vocal supérieur à celui de l’Opéra Royal de Wallonie-Liège, ses membres font preuve d’une forte implication scénique.
Enfin, l’Orchestre, placé sous la baguette de son directeur musical, Giampaolo Bisanti, se révèle remarquable de lyrisme, soignant les lignes et la beauté des mélodies. Il garde toujours une forme de légèreté, ne dramatisant pas l’action avec excès, mais restant dans l’onirisme et la fantaisie de la partition.
CLAIRE-MARIE CAUSSIN