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Aleko sort des ombres de Barbe-Bleue à Athènes

02/12/2024
Tassis Christoyannis (Aleko). © Andreas Simopoulos

Stavros Niarchos Hall, 12 novembre

Fort du succès rencontré par Le Château de Barbe-Bleue, mis en scène par Themelis Glynatsis, en mars 2023 (voir O. M. n° 192 p. 37 de mai), la direction du Greek National Opera (GNO) a choisi de le programmer à nouveau, en l’associant, non plus à Gianni Schicchi, mais au rare Aleko de Rachmaninov, confié à Fanny Ardant, de retour à Athènes, cinq ans après Lady Macbeth de Mtsensk (voir O. M. n° 152 p. 40 de juillet-août 2019).

Le Château de Barbe-Bleue, avec son impressionnant décor de roches basaltiques, sur lequel repose une anguleuse chambre à coucher, illustre à merveille cette atmosphère morbide et onirique, présente dans le célèbre conte de Perrault. Les références au cinéma, et à Hitchcock, en particulier, pullulent.

Contraint, dans cet espace mental, à la sobriété et à l’immobilisme, Tassos Apostolou semble bridé dans sa composition de Barbe-Bleue, sans que sa voix blanche et compacte ne puisse compenser un parti pris un peu réducteur. Violetta Lousta a le physique de Judith, mais son soprano, plus assuré dans l’aigu que dans le grave, est fréquemment étouffé par l’orchestre, dirigé, il est vrai, sans réelles nuances, par le chef italien Fabrizio Ventura.

Fidèle à la nouvelle de Pouchkine, Fanny Ardant signe, quant à elle, avec Aleko, un spectacle de facture classique, sensible et élégant, avec la complicité du scénographe Pierre-André Weitz. Le campement des Tziganes, avec sa scène centrale improvisée, encadrée par deux roulottes éclairées par la lune, plante le décor de ce drame passionnel, qui n’est pas sans évoquer Carmen ou Pagliacci.

Au milieu de cette communauté fière et soudée, aux vêtements bariolés, dont la liberté s’exprime dans les nombreux passages dansés, chorégraphiés par un Israel Galvan très inspiré, l’Aleko fébrile et ombrageux de Tassis Christoyannis détonne. Torturé, incapable d’être abandonné, il préfère, comme Don José ou Canio/Pagliaccio, sacrifier l’objet de son amour plutôt que de subir l’humiliation ultime.

Face au baryton grec, en grande voix, sa compatriote, la soprano Myrsini Margariti, est une Zemfira conquérante, chœur et comprimari unissant leurs forces, pour répondre à la direction musicale, cette fois très soignée, de Fabrizio Ventura.

FRANÇOIS LESUEUR

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