Aleksandra Kurzak (Anita) – Roberto Alagna (Araquil) – George Andguladze (Garrido) – Brian Kontes (Remigio) – Issachah Savage (Ramon) – Michael Anthony McGee (Bustamente)
New York Choral Ensemble, Opera Orchestra of New York, dir. Alberto Veronesi
1 CD Warner Classics 0190295605704
La réédition de La Navarraise gravée par Antonio de Almeida, en 1975, avec Lucia Popp, Alain Vanzo et Vicente Sardinero dans les rôles principaux, nous a récemment permis de revenir sur ce court opéra de Massenet, créé à Londres, en 1894, en pleine mode vériste (voir O. M. n° 139 p. 81 de mai 2018). La nouvelle intégrale de studio qui nous parvient, commencée en novembre 2011 et terminée en mai 2017, bénéficie d’atouts sensiblement supérieurs.
Aleksandra Kurzak, d’abord, dispose d’une voix large, aux couleurs bien marquées, capable de donner à la malheureuse héroïne, égarée dans les guerres carlistes, le relief dramatique et le ton pathétique nécessaires. L’attention portée aux mots, la flamme qui se dégage de son chant, la retenue qui vient tempérer ses élans, lui permettent de tracer un portrait fort convaincant de cette proche parente de Carmen et Santuzza.
Auprès d’elle, Roberto Alagna se montre tel qu’il peut être unique, avec cette élégance du phrasé, cette noble ardeur, cette sincérité d’expression qui, une fois encore, font merveille. Certes, son timbre s’est quelque peu durci avec l’âge, mais cela lui sert à explorer les aspects les moins lisses du caractère d’Araquil.
Le reste de la distribution est d’un bon niveau, rien de plus, et respecte avec soin les contraintes de la prosodie française. Tel est le cas du Géorgien George Andguladze et de l’Américain Brian Kontes, qui campent des personnages aux traits bien dessinés.
À l’Opera Orchestra of New York, Alberto Veronesi insuffle une belle dynamique, en plaçant ces deux actes fébriles, séparés par un délicat « Nocturne », à la juste frontière entre le brutal fait divers et le drame intemporel.
Pour qui veut découvrir La Navarraise dans des conditions d’écoute modernes, cette intégrale représente assurément le meilleur choix.
PIERRE CADARS