Avec son premier récital en solo pour Harmonia Mundi, Carlo Vistoli confirme la place éminente qu’il occupe, aujourd’hui, au sein de la riche constellation des contre-ténors.

Si ce nouvel enregistrement, réalisé en studio, en juillet 2023, marque, avec éclat, les débuts exclusifs de Carlo Vistoli, chez Harmonia Mundi, il séduit, plus encore, par son approche charnelle et solaire des célèbres Stabat Mater RV 621, Nisi Dominus RV 608 et In furore iustissimae irae RV 626. Aux antipodes des visions, souvent trop extatiques, proposées par ses confrères, celle du contre-ténor italien se distingue par ses couleurs charnues, sa virtuosité fiévreuse et son expressivité rare.

Dès l’introduction péremptoire des cordes du Nisi Dominus, l’interprétation apparaît étonnamment vibrante et libre. Avec Carlo Vistoli, les élans virtuoses ne semblent jamais démonstratifs ou vains ; au contraire, ils sacralisent le texte de manière flamboyante et offrent, à chaque inflexion, une puissance renouvelée. Dans cette perspective, Surgite postquam sederitis fascine par sa verve et son impact, tout à fait inhabituels.

Scandé avec une admirable profondeur de ton, Cum dederit dilectis suis somnum transperce l’âme par sa lancinante concentration, tandis que Sicut sagittae in manu potentis décoche d’imparables flèches vocales. La vibrante louange Gloria Patri, et Filio, et Spiritui Sancto, avec viole d’amour obligée, irradie de lumière, avant de se conclure par un Amen superbement exalté.

Le Stabat Mater bénéficie des mêmes qualités. Toujours très inspiré, Carlo Vistoli confère à cette œuvre, maintes fois enregistrée, un dolorisme aussi fort que singulier. Au fil des neuf séquences, la voix accomplit de véritables prodiges, en termes de nuances et d’impact émotionnel. Le timbre s’offre ainsi dans ce qu’il a de plus pénétrant, de plus capiteux, sur Stabat Mater dolorosa, alors que Cuius animam et Quis non posset soulignent l’extrême soin porté à la symbolique des images et au poids des mots.

En contrepoint, le motet In furore iustissimae irae foudroie par sa vitalité ravageuse. D’une aisance folle sur les vocalises tourmentées de la première strophe, le contre-ténor s’abandonne ensuite, avec une délectation palpable, sur les mélismes doux-amers de Tunc meus fletus. Quant à l’Alleluia conclusif, il s’apparente à un feu d’artifice, au cours duquel la voix s’embrase une ultime fois.

Sous l’impulsion ardente de Georg Kallweit, son premier violon, l’Akademie für Alte Musik Berlin sublime l’écriture versatile de Vivaldi, jusque dans les trois pièces instrumentales qui complètent le disque, bluffantes de densité et de plasticité.

CYRIL MAZIN

DIAMANT

Vivaldi : Sacro furore
Stabat Mater, Nisi Dominus, In furore iustissimae irae, Concerto en sol mineur, Concerto « Madrigalesco » en ré mineur, Sinfonia « Al Santo Sepolcro » en si mineur
Akademie für Alte Musik Berlin, dir. Georg Kallweit
1 CD Harmonia Mundi HMM 902383

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