On en parle Polifemo virtuose à l’Opéra du Rhin
On en parle

Polifemo virtuose à l’Opéra du Rhin

01/02/2024
Maquette du décor signé Annemarie Woods. © DR

Le film Farinelli de Gérard Corbiau (1994) a fait de l’air « Alto Giove » un « tube » baroque  – à l’instar du célébrissime « Ombra mai fu », mieux connu sous le nom de « Largo de Haendel », bien qu’en réalité, un larghetto. Ce qui n’a, certes, pas suffi à soustraire, aussitôt – loin s’en faut –, de l’oubli, l’opéra dont il est tiré, tout comme, d’ailleurs, son compositeur, Nicola Porpora, éminent professeur du castrat le plus illustre de l’histoire. 

Recréé à Bibbiena, en 2004, présenté à Schwetzingen, en 2012, puis, en concert, au Theater an der Wien, l’année suivante, Polifemo a eu les honneurs, sous l’égide et la férule de Max Emanuel Cencic, d’une nouvelle production, au Festival de Pentecôte de Salzbourg, en juin 2019, qui a, ensuite, donné lieu à un premier enregistrement intégral (voir, plus loin, nos pages Guide).

L’Opéra National du Rhin en propose, du 5 février au 10 mars, à Strasbourg, Mulhouse et Colmar, la création française, dans un spectacle signé Bruno Ravella, à qui revient la tâche de démêler une intrigue dans laquelle le librettiste, Paolo Antonio Rolli, opère un télescopage mythologique entre le Cyclope éponyme d’Homère, aux prises avec Ulysse, et celui d’Ovide, amoureux transi, et d’une jalousie fatale à Acis, de Galatée.

Au pupitre de son Concert d’Astrée, Emmanuelle Haïm débute son exploration de Porpora, avec cette partition, pavé jeté, le 1er février 1735, dans la mare de Haendel, qui venait, sinon de subir un échec, du moins de remporter un succès d’estime, avec Ariodante – et n’allait pas tarder à riposter, avec Alcina –, par la compagnie rivale, récemment installée à Londres, l’Opera of the Nobility.

« Les approches des deux compositeurs n’ont rien à voir l’une avec l’autre, explique la cheffe française. Alors que, chez Haendel, le choix des airs est extraordinairement théâtral, l’écriture de Porpora est très hédoniste, et dévolue à la gloire des chanteurs. » Le « Caro Sassone », au caractère notoirement difficile, et donc peu enclin à se soumettre au bon vouloir de ses interprètes, venait, d’ailleurs, de perdre sa prima donna, Francesca Cuzzoni, et son primo uomo, Senesino, au profit de la concurrence, qui disposait, en outre, du talent inégalable de Farinelli, l’Aci de Polifemo.

« Il y a, aujourd’hui, de plus en plus de très bons contre-ténors, constate Emmanuelle Haïm, mais ils sont moins nombreux à être à l’aise dans les parties sopranisantes, comme celle-ci. Le choix de Franco Fagioli qui, par ailleurs, avait déjà abordé le rôle, s’imposait donc. Et Paul-Antoine Bénos-Djian, qui a une couleur magnifique, sera Ulisse, composé pour la tessiture de Senesino. »

De quoi faire perdre la tête, et son œil, au Polifemo de José Coca Loza !

MEHDI MAHDAVI

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