Après Mein Traum, première incursion de l’ensemble Pygmalion, en concert et au disque (Harmonia Mundi), déjà en compagnie de Stéphane Degout (voir O. M. n° 186 p. 77 d’octobre 2022), dans certains des opéras et oratorios de Schubert – qui représentent environ un tiers de sa production –, Raphaël Pichon a voulu aller plus loin dans l’exploration de ces territoires reculés, en réunissant certaines de ces pages, sous la forme de « tableaux lyriques », à l’Opéra-Comique, du 1er au 11 février (puis à l’Opéra de Dijon, les 6 et 8 mars).
Pourquoi ce florilège d’extraits, et non pas l’une des (rares) partitions complètes, écrites par le compositeur pour la scène ? « Ces œuvres sont trop inégales », confie Raphaël Pichon, qui évoque un Schubert « prisonnier des règles de l’opéra de cette époque et des livrets assez médiocres ».
Pourtant, lorsqu’il se plonge dans ces partitions, le fondateur de Pygmalion est fasciné par certains passages, dignes des plus grands chefs-d’œuvre du maître du lied.Convaincu que cette musique mérite d’être jouée, l’adroit gaucher a donc décidé de concevoir un écrin onirique à ces instants de grâce.
Intitulé L’Autre voyage, en écho à Winterreise, le spectacle imaginé par Raphaël Pichon et la metteuse en scène Silvia Costa est construit autour du personnage d’un médecin légiste (Stéphane Degout), qui réalise, un beau matin, que le corps qu’il doit autopsier n’est autre que le sien.
L’homme va alors explorer ses souvenirs, en examinant les traces que les événements de la vie ont laissées sur chacun de ses organes. Figure du Doppelgänger, cheminement intérieur, expression des sentiments et de la souffrance, affrontement avec la mort… Ces thèmes chers à Schubert se mêleront en « un songe un peu mystique, une méditation scénique ».
Les différentes œuvres s’entrecroiseront sans dialogues parlés, mais selon les principes du « mélodrame », avec des personnages très caractérisés : l’Amour (Siobhan Stagg), l’Amitié (Laurence Kilsby) et l’Enfant (Chadi Lazreq).
Outre des extraits de Fierrabras, Alfonso und Estrella et Lazarus, l’ensemble Pygmalion (chœur et orchestre) – accompagné par la Maîtrise Populaire de l’Opéra-Comique – interprètera quelques lieder orchestrés par Liszt et Brahms, des pièces instrumentales et des chœurs a cappella.
ROXANE BORDE