Metteur en scène de légende, Peter Brook comptait parmi les plus grands représentants du théâtre du XXe siècle. Il s’est éteint hier, samedi 2 juillet, à l’âge de 97 ans.
Son héritage est colossal. Dès les années 1960, il s’affranchit du décor et développe la théorie de l’« espace vide » qui marquera durablement l’histoire du théâtre : « Je peux prendre n’importe quel espace vide et l’appeler une scène. Quelqu’un traverse cet espace vide pendant que quelqu’un d’autre l’observe, et c’est suffisant pour que l’acte théâtral soit amorcé. »
Homme de théâtre, Peter Brook l’est depuis toujours. Enfant déjà, il joue Hamlet avec un petit théâtre de marionnettes que lui a construit son père. Hasard ou destin, il ne cessera de revenir à Shakespeare tout au long de sa carrière. Ses débuts sont fulgurants : tout juste diplômé d’Oxford, Brook n’a que 22 ans quand il met en scène Romeo and Juliet à Stratford-upon-Avon, et n’est guère plus âgé quand il devient directeur de production au Covent Garden de Londres. Malgré sa jeunesse, il met en scène les plus grands auteurs avec aisance, comme Jean Cocteau, Jean Genet ou Jean-Paul Sartre, pour ne citer que les Français.
Car la France, Peter Brook l’aimait beaucoup. Installé à Paris depuis les années 1970, il crée le Centre international de recherche théâtrale avec Micheline Rozan, avant de reprendre le Théâtre des Bouffes du Nord, qu’il dirige pendant près de quarante ans.
Parmi ses grandes mises en scène, on retient notamment Salome de Strauss, qui provoqua un tollé au Covent Garden de Londres en 1949, King Lear ou encore Oh les beaux jours de Samuel Beckett. Mais son plus grand spectacle restera Le Mahabharata, une épopée de neuf heures, qu’il adaptera au cinéma en 1989.
Rare à l’opéra, il s’affranchit de ses contraintes et pesanteurs dans des adaptations de piliers du répertoire qui ont fait date, comme La Tragédie de Carmen, Impressions de Pelléas, et plus récemment Une flûte enchantée. Il monta également Don Giovanni de Mozart au Festival d’Aix-en-Provence.
Salué par la critique anglaise dans les années 1990, comme « le meilleur metteur en scène que Londres n’a pas », nous mesurons notre chance, en France, de l’avoir eu beaucoup.
LA RÉDACTION