
2 CD Palazzetto Bru Zane BZ 1062
Un nouvel enregistrement dû au Palazzetto Bru Zane permet de redécouvrir Psyché d’Ambroise Thomas, qui connut deux versions à deux décennies de distance : créé sous forme d’« opéra-comique » en 1857 à l’Opéra-Comique, l’ouvrage fut muni de récitatifs en 1878 en perdant au passage tout ce qu’il avait de léger. C’est pourquoi a été choisie ici la version de 1857, étoffée de plusieurs modifications intervenues en 1878, dont l’ajout de deux airs de Psyché, et la transposition pour baryton vocalisant du rôle de Mercure (voir O. M. n° 210 p. 6).
Sans crier au génie, on appréciera la solidité de cette Psyché, l’énergie qu’elle exige de l’orchestre et les exploits vocaux qu’elle demande aux chanteurs. Aux chanteuses surtout, car l’ouvrage repose sur les airs et les duos du rôle-titre et d’Éros, confié à un mezzo travesti. Hélène Guilmette a la facilité et la fraîcheur qui font de sa Psyché un personnage transparent, qui subit son sort avec tour à tour de l’émerveillement et de l’abattement. Son air « de l’extase », qui conclut l’acte II, est une merveille. Éros agit davantage, et Antoinette Dennefeld affronte avec brio les vocalises spectaculaires que Thomas lui a confiées, notamment dans l’air « Ô nymphes » du II. Il y a là un héroïsme que Dennefeld sert magnifiquement.
On peut regretter que le compositeur ait fait un peu trop de Mercure un apologue de Bacchus, mais Tassis Christoyannis, à force de nuances et d’intentions comiques, le fait pencher vers Méphistophélès et nous rappelle que Mercure est aussi un rouage essentiel à l’action, même si à la fin, très classiquement, le ciel s’ouvre et tout est pardonné par les dieux. Restent les deux sœurs de Psyché (Mercedes Arcuri et Anna Dowsley) et leurs deux maris (Artavazd Sargsyan et Philippe Estèphe) qui, sans vraiment nous faire rire, apportent un contrepoint malicieux dans la tradition de l’« opéra-comique ».
Les interprètes sont tous français, sauf Anna Dowsley, qui articule très bien, et Tassis Christoyannis, qui se sent comme chez lui dans notre langue. Les dialogues sont dits avec autant de naturel que possible, et les chœurs eux-mêmes ne nous laissent aucune impression d’exotisme. Il y a du Verdi dans le traitement des chœurs de Psyché, un peu d’Offenbach ici et là, voire un peu de Mendelssohn (au début de l’acte II), mais György Vashegyi dirige avec la souplesse qui convient et réussit à donner une unité à cet opéra dont les splendides moments confiés à Éros et à Psyché font tout le sel.
CHRISTIAN WASSELIN
Hélène Guilmette (Psyché) – Antoinette Dennefeld (Éros) – Tassis Christoyannis (Mercure) – Mercedes Arcuri (Dafné – Première Nymphe – Deuxième Écho) – Anna Dowsley (Bérénice – Deuxième Nymphe – Premier Écho) – Artavazd Sargsyan (Antinoüs – Un jeune garçon) – Philippe Estèphe (Gorgias) – Christian Helmer (le Roi)
Chœur National de Hongrie, Orchestre Philharmonique National de Hongrie, dir. György Vashegyi
2 CD Palazzetto Bru Zane BZ 1062
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