1 CD Château de Versailles Spectacles CVS 174
On s’étonne que, si peu de temps après la parution du Pi(y)gmalion de Rameau dirigé par Camille Delaforge, avec Mathias Vidal dans le rôle-titre (voir O. M. n° 212 p. 93 de mai 2025), Château de Versailles Spectacles en publie un nouveau, même si le complément est différent. Pour la distribution, cette nouvelle version surclasse aisément la précédente : Ema Nikolovska est une Céphise imposante de voix et de ton, Gwendoline Blondeel chante en grande habituée du rôle d’Amour, et Virginie Thomas peint parfaitement l’émerveillement de la Statue prenant vie. Reinoud Van Mechelen, quant à lui, est un Pygmalion stylé, élégant, intelligent dans ses variations, et bien disant (quel plaisir d’entendre ce « Règne, amour » respectant l’élision !), avec cependant un vibrato plus présent que de coutume. Il ne lui manque, pour enthousiasmer complètement, qu’un zeste d’excitation désinvolte dans le brio du finale. De même sa direction, d’un beau naturel mais un peu tranquille, à la tête de son orchestre a nocte temporis, dont la texture favorise inhabituellement les flûtes.
La Zémide de Pierre Iso (v. 1715-v.1794) est une découverte absolue. Maître de violon et de chant à Moulins, il vint à Paris où il connut en 1759 la consécration de l’Académie Royale avec deux opéras en un acte, dont celui-ci, où s’entend une musique de belle facture, clairement d’obédience ramiste. L’ouvrage présente Zémide, reine de Scyros, qui lutte contre l’Amour, mais que le dieu vainc par la ruse. Parmi les moments saillants par l’écriture, on signalera le duo conflictuel Amour-Zémide et surtout la scène de capture d’Amour, aux harmonies hardies. Zémide est un beau rôle de bas-dessus, auquel la mezzo Ema Nikolovska donne un grand relief, sa diction mordante et éloquente compensant de menues inexactitudes de voyelles. Dommage quand même qu’elle ne s’inspire pas plus du sens de la ligne de son chef, et césure trop le texte. Un travers partagé par Philippe Estèphe, qui assume aisément le court rôle de Phasis (basse-taille), soupirant de la reine in fine récompensé, malgré une émission un peu appuyée, surtout pour un amoureux transi. Gwendoline Blondeel ajoute ce nouvel Amour à son catalogue, avec ici une légère paresse côté diction.
Après une première entrée – supposée en coulisses (« Cédons, cédons ») – assez confuse, le Chœur de Chambre de Namur, enfin, apporte sa compétence bien connue à ses interventions assez brèves, avec une théâtralité plus marquée dans Zémide.
THIERRY GUYENNE
Ema Nikolovska (Céphise, Zémide) – Reinoud Van Mechelen (Pygmalion) – Gwendoline Blondeel (L’Amour) – Virginie Thomas (La Statue) – Philippe Estèphe (Phasis)
a nocte temporis, Chœur de Chambre de Namur, dir. Reinoud Van Mechelen
1 CD Château de Versailles Spectacles CVS 174
