Un an après la disparition de Hugues Randolph Gall, voici un bel album de souvenirs. Sourire et émotion, chefs, metteurs en scène, chanteurs, collaborateurs, amis, illustres ou peu connus, ils sont soixante-quinze à construire le portrait de ce directeur d’opéra « paradoxal, emporté, généreux, blessant » (F. Chambert). Il y avait deux Gall, le public, volontariste, direct ; et le discret, épris de liberté, charmeur, pratiquant l’humour comme peu – on a eu la chance d’en profiter quelques fois.
Une légende désormais, celle d’un patron qui fit ses classes chez Edgar Faure, puis comme « secrétaire général » (sous René Nicoly) d’une RTLN agonisante, qui renaîtrait, éblouissante, sous la férule de Rolf Liebermann, avec qui il géra la maison Opéra de Paris de 1973 à 1980, en adjoint qui apprenait autant qu’il agissait. Genève en fit, pour neuf ans, un directeur attendu à Paris pour relancer un couple Bastille/Garnier qui avait du mal à s’imposer, par inconséquence de l’État. Un rapport pour rebâtir les fondations, une tutelle qui avait fini par comprendre, et Gall put régner, monarque absolu, de 1995 à 2004.
Suivirent, avec l’Académie des beaux-arts, nombre de postes pour un grand serviteur de l’État, et à partir de 2008, la Fondation Monet à Giverny, un paradis. Il y resta jusqu’à son décès, à 84 ans, précédant de deux semaines celui de son époux, le danseur Éric Vu-An. Lecture délicieuse, car vivante encore.
PIERRE FLINOIS
Hugues R. Gall : Mélanges, Edition Gourcuff Gradenigo, 240 p. 32 €
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