Opéras Zaide à Avignon
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Zaide à Avignon

09/05/2025
Andres Cascante, Aurélie Jarjaye, Kaëlig Boché et Mark Van Arsdale. © Studio Delestrade - Avignon

Opéra, 25 avril

L’Opéra Grand Avignon reprend la mise en scène signée Louise Vignaud, créée à Rennes puis donnée à Angers-Nantes Opéra et dont Thierry Guyenne avait rendu compte (voir O. M. n° 191 p. 53 d’avril 2023

En 1780, Mozart, âgé de vingt-quatre ans, compose Zaide, un Singspiel qu’il n’achève pas : manquent l’ouverture et le final.

Comment aborder l’œuvre aujourd’hui ? Les coproducteurs, les opéras de Rennes, Angers, Nantes et Avignon, ont pris des partis radicaux. Pour remplacer le début et la fin, le chef Nicolas Simon a fait appel au jeune compositeur français Robin Melchior, qui a eu le tact de ne pas chercher à pasticher Mozart. Son ouverture est une marche où règnent percussions et cuivres. Quant au final, c’est un quatuor vocal spectaculaire, qui rappelle quelque peu les comédies musicales en vogue à Broadway. Il met en valeur Zaide, ce qui permet à Aurélie Jarjaye de lancer des aigus triomphants. A été ajouté un nouveau personnage parlé (si les parties chantées sont dans l’allemand original, les dialogues sont en français), Inzel, esprit des lieux qui veille sur les naufragés. Malheureusement, son interprète ne possède ni la personnalité étrange ni la diction de Marief Guittier, grande actrice de théâtre qui avait créé le rôle.

La production est on ne peut plus austère, sous le signe de la couleur noire. Sombre le décor, avec ses rochers et ses parois au pied desquels se remarquent de petits amoncellements de bouteilles en plastique. Sombres les costumes – tee-shirts, bermudas, godillots –, qui ne flattent guère les chanteurs, et encore moins la chanteuse. Magnifique, l’image finale : un soleil noir s’éclipse, soulignant l’ambiguïté d’une conclusion qui n’en est pas une…

Les interprètes ne font guère entendre, faute d’élocution française adéquate, les dialogues parlés. Mais dès qu’ils se mettent à chanter, tout change. Leurs voix jeunes, fraîches et spontanées font merveille dans des airs où brillent le génie et la fougue juvénile de Mozart. Sous la direction nuancée de Nicolas Simon, l’Orchestre National Avignon-Provence chatoie de mille feux, annonçant parfois Die Entführung aus dem Serail.

D’une blondeur éthérée, jointe à une voix limpide, Aurélie Jarjaye est une Zaide idéale, à la fois innocente et déterminée. « Ruhe sanft » (Repose calmement), enjoint-elle à Gomatz avec des intonations suaves. Dans « Trostlos schluchtzet Philomele », elle se compare à un oiseau en cage qui se lamente sur sa liberté perdue. Son grand air de fureur, adressé à Soliman, « Tiger! », montre la chanteuse en virtuose implacable. Ses duos et trios révèlent des partenaires à sa hauteur. Mark Van Arsdale est un Soliman à la voix imposante et aux colères terrifiantes, tandis que Gomatz a la sensibilité de Kaëlig Boché, et Allazim les accents sincères et touchants d’Andres Cascante. L’accueil du public avignonnais est chaleureux, et on ne peut que souscrire à l’opinion émise à la création par Thierry Guyenne : « un spectacle inégal mais sympathique »

BRUNO VILLIEN

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