Théâtre du Châtelet, 8 juin
Point n’est besoin de longs discours pour célébrer les pouvoirs de l’amour. Olivier Py le prouve en un acte. Pour cet Amour vainqueur, adaptation du conte des frères Grimm, Demoiselle Maleen, il est sur tous les fronts : librettiste, compositeur, metteur en scène.
Des alexandrins blancs lui permettent de bâtir un texte, dont la clarté poétique n’égale que la pugnacité et la portée politique. Des mélodies simples, immédiatement touchantes, en rehaussent l’efficacité, le tout porté par une mise en scène immédiatement accessible – il s’agit là d’un spectacle qui, chez les enfants auxquels il est d’abord destiné, doit être, à la fois, source de plaisir et de réflexion. On y parle d’amour, mais aussi de guerre, de mort, ainsi que d’espoir, et même de genre.
Un Roi cupide et lâche, et un Général, incarnation du mal absolu, mènent un pays à la destruction ; une Princesse, amoureuse d’un Prince, refuse un mariage forcé ; une Fille de vaisselle rêve d’être un guerrier, tandis qu’un Jardinier souhaiterait être une femme, pour ne pas devenir soldat et continuer à s’occuper de ses abeilles. Dans ce conte musical, qui flirte ouvertement avec l’opérette, s’affrontent six personnages – incarnés par quatre interprètes – et leurs désirs.
Pierre-André Weitz a imaginé pour eux un cadre de scène évoquant un théâtre de tréteaux, ou de marionnettes, propre à ouvrir grand les portes de l’imaginaire, avec, en fond, des paysages de fantaisie, jardins apaisants ou sinistres ruines. Efficacité garantie.
Un quatuor épatant d’artistes rompus à toutes les disciplines mène la danse, comédiens, chanteurs, certains instrumentistes, comme la soprano Clémentine Bourgoin, Princesse vive et délurée, qui joue du violoncelle, ou Antoni Sykopoulos, baryton incisif et talentueux pianiste, dont le Roi et le Général semblent sortis d’une gravure satirique.
Prince charmant, mais aussi Fille de vaisselle hilarante et parfois émouvante, Pierre Lebon, également baryton, sait tout faire, comme le ténor Flannan Obé, Jardinier joignant la subtilité à la drôlerie.
Créé au Festival d’Avignon, en 2019, cet Amour vainqueur, dont le titre est déjà tout un programme, n’a rien perdu de son actualité.
MICHEL PAROUTY