Pour la deuxième année consécutive, le Festival Peralada – nouveau nom du Festival « Castell de Peralada » –, dans le nord de la Catalogne, à quelques kilomètres de la frontière franco-espagnole, doit fonctionner sans auditorium de plein air. En effet, la structure en dur, appelée à remplacer l’ancien Auditorium provisoire (Auditori), est encore à l’état de projet.
« Nous sommes sur le point de choisir l’architecte, après étude des différents plans proposés », explique Oriol Aguila, directeur artistique de la manifestation, présidée par Isabel Suqué Mateu. « Une fois la décision prise, il sera possible d’évaluer la durée des travaux et de fixer une date d’inauguration. Nous avons conscience de l’urgence, mais nous avons voulu nous donner le temps nécessaire, pour aboutir à l’Auditorium de nos rêves. Ce temps nous a permis d’expérimenter d’autres solutions de programmation, dans des lieux et des formats auxquels nous n’aurions pas forcément pensé, sans rien perdre de la qualité attendue d’un festival international comme le nôtre. Ces solutions, de surcroît, trouveront un prolongement dans le futur de la manifestation, après l’inauguration du nouvel Auditorium. »
Pour ce qui concerne la voix, cette édition 2024 s’ouvrira le 19 juillet, en l’Église du Carmel (Esglesia del Carme), avec un récital de Piotr Beczala, accompagné au piano par Sarah Tysman. « Piotr est déjà venu à Peralada, dans l’Auditorium comme à l’Église », précise Oriol Aguila. « La première fois, c’était en 2014 : ce concert fêtera donc son 10e anniversaire avec nous. Le public l’adore, et c’est réciproque ! Il chantera des mélodies de Tchaïkovski, complétées par des airs d’opéra : Le Manoir hanté, Rusalka, Un ballo in maschera, Tosca. »
Le 26 juillet, toujours à l’Église, Sonya Yoncheva et Ismael Jordi partageront l’affiche, avec Ruben Fernandez Aguirre au piano. « Un programme entièrement dédié à la « zarzuela« , que Sonya et Ismael ont déjà donné, le 27 octobre 2023, à Sofia. Il était logique qu’ils le reproposent sur le sol espagnol, tant ce genre musical est lié à notre culture. Nous sommes heureux que Sonya, déjà connue au Festival, y revienne dans ce répertoire, aussi cher à son cœur qu’au nôtre. Quant à Ismael, ce seront ses débuts à Peralada. Comptant parmi nos meilleurs ténors du moment, il était logique que nous l’invitions à un moment ou à un autre. »
La fête des grandes voix se poursuit à l’Église, le 27 juillet, avec Anna Pirozzi, accompagnée par la pianiste Sophia Muñoz et le Quartetto Lirico Italiano. « Cette soprano était déjà venue, en 2022, pour Nabucco, en concert, avec les forces du Teatro Real de Madrid. Ce sera son premier récital en solo au Festival, un hommage à Puccini et à quelques autres grands compositeurs italiens. Anna n’a pas choisi la facilité : Norma, Anna Bolena, La forza del destino, Edgar, ou encore Andrea Chénier ! »
Dernière étoile du chant, montante celle-là, à l’Église : Sara Blanch, le 5 août. « Sara, originaire de Tarragone, au sud de la Catalogne, a été la première artiste en résidence au Festival, en 2016. Depuis sa participation à l’Accademia Rossiniana du « Rossini Opera Festival » de Pesaro, en 2013, le compositeur italien a accompagné sa progression vers les sommets. Nous lui avons donc demandé un programme Rossini, avec la complicité d’habitués de Pesaro : le pianiste Giulio Zappa et le baryton Paolo Bordogna. Deux duos sont prévus : Il Turco in Italia et Il barbiere di Siviglia. »
Côté voix solistes, toujours, un concept un peu spécial, baptisé « La Belle Meunière. De la Cave à l’Église », le 31 juillet, attire le regard. « L’idée est d’offrir une expérience musicale différente. Il s’agira d’un parcours, qui commencera dans les jardins de la Cave (Celler) de Peralada et s’achèvera à l’Église, avec dégustation des vins du domaine, au programme. Le ténor allemand Julian Prégardien attaquera le cycle schubertien avec guitare (Isolde Santana), et le terminera avec piano (Anna Gebhardt), la pérégrination comprenant, également, la lecture de poèmes par le comédien Francesc Torrent. C’est un format que nous envisageons de renouveler, chaque année, même quand le nouvel Auditorium sera ouvert. »
L’opéra faisant partie de l’ADN du Festival, Oriol Aguila a programmé, le 8 août, la création mondiale de Don Juan no existe (Don Juan n’existe pas). « La compositrice Helena Canovas Pares, installée à Cologne mais née à Tona, près de Barcelone, a gagné la deuxième édition des « Carmen Mateu Awards », compétition organisée par le Festival. Son prix était la commande d’un opéra de chambre, en coproduction avec le Liceu de Barcelone et la Maestranza de Séville, et avec la collaboration du Teatro Real et des Teatros del Canal de Madrid. Nous le proposerons au Mirador del Castell, salle polyvalente pouvant accueillir aussi bien des réceptions que des concerts, avec un petit ensemble instrumental. Dirigé et mis en scène par des femmes (Jhoanna Sierralta et Barbara Lluch), Don Juan no existe veut rendre hommage à toutes les femmes qui ont été éliminées de l’histoire, pour le simple fait d’être nées femmes. »
RICHARD MARTET