Opéras Un Barbiere balnéaire à Tours
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Un Barbiere balnéaire à Tours

27/10/2023
Pierluigi D’Aloia (Il Conte d’Almaviva), Franck Leguérinel (Bartolo) et Sung-Hwan Damien Park (Figaro). © MariePétry

Grand Théâtre, 8 octobre

L’Opéra de Tours donne l’occasion à quelques chanteurs de l’Académie de la Scala (Accademia Teatro alla Scala) de se produire, en partenariat avec l’institution lyrique milanaise, dans Il barbiere di Siviglia. Mis en scène par Émilie Delbée, ce spectacle leur offre un cadre privilégié pour faire leurs armes, aux côtés du baryton français Franck Leguérinel, et met en valeur leur jeunesse.

Située dans une station balnéaire, dans les années 1920, la chambre de Rosina est une cabine de plage au bord de l’eau, entourée seulement de quelques chaises et transats. Le deuxième acte représentera, ensuite, par l’ajout d’une baie vitrée et d’un sofa, le salon de Bartolo. Mais Émilie Delbée s’amuse aussi, à de nombreuses reprises, à briser le quatrième mur par d’habiles changements de lumières, qui permettent aux personnages de s’adresser directement au spectateur, et de créer, d’une certaine manière, un espace de jeu supplémentaire.

Sans être systématique, ce procédé relance la comédie ; il évite aux chanteurs des moments de flottement, en leur donnant des interlocuteurs, et donc en nourrissant leur interprétation. C’est, sans doute, également dans ce but que la metteuse en scène, décoratrice et costumière française utilise de nombreux accessoires, même si elle ne parvient pas toujours à en tirer parti – certains relevant davantage du gadget ou du gag visuel, qu’aidant à caractériser le personnage ou à accompagner l’action.

Le plateau est dominé par Franck Leguérinel, d’un humour absolu, et dont la voix se plie à toutes les inflexions du texte, comme à tous les effets comiques. Son Bartolo offre un modèle d’équilibre entre la musicalité et le sens dramatique, qu’il partage avec le Figaro de Sung-Hwan Damien Park.

Le baryton coréen impose, dès son « Largo al factotum », la verve attendue du personnage. On apprécie, notamment, le soin qu’il apporte à la diction et à la mise en valeur du texte, ce qui lui donne plus d’impact qu’à ses autres jeunes collègues de l’Académie de la Scala.

Ces derniers n’en sont pas moins prometteurs. La mezzo-soprano italienne Mara Gaudenzi fait entendre, en Rosina, une voix bien homogène sur toute la tessiture, des graves profonds, ainsi que des vocalises impeccables. Quant à son compatriote, le ténor Pierluigi D’Aloia, il possède, sans aucun doute, l’étoffe d’un très bon Almaviva : il ne lui manque qu’une plus grande souplesse dans les ornements, ainsi qu’à l’approche de l’aigu.

La basse chinoise Huanhong Livio Li offre un Basilio d’une belle solidité. Et l’on retiendra, tout particulièrement, la Berta de la soprano italienne Greta Doveri, dans un rôle qui n’est pas toujours confié à de si jolies voix.

Le Chœur de l’Opéra de Tours, toujours sonore dans ses interventions, privilégie l’efficacité au détriment du relief. Les musiciens de l’Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire/Tours, placés sous la direction de Clelia Cafiero, montrent, en revanche, un parfait équilibre entre les pupitres.

On apprécie, également, des soli particulièrement chantants dans les pupitres des vents, et des tempi assez retenus dans les finales. La cheffe italienne ne cède pas à l’euphorie rossinienne, mais préfère conserver une lecture lisible, pondérée, laissant aux chanteurs une clarté d’articulation. L’ensemble n’en est pas moins joyeux, et tout à fait intelligent sur le plan dramatique.

CLAIRE-MARIE CAUSSIN

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