Lyric Opera, 23 septembre
Le Lyric Opera a ouvert sa saison 2023-2024 avec une production, inédite à Chicago, de Der fliegende Holländer, signée par le metteur en scène américain Christopher Alden. Créé à Toronto, par la Canadian Opera Company, en 1996, le spectacle a, depuis, été repris dans de nombreuses maisons nord-américaines, et notamment à l’Opéra de Montréal (voir O. M. n° 80 p. 43 de janvier 2013).
On aurait pu, dès lors, s’attendre à une conception plus perspicace et cohérente. Malheureusement, s’apparentant à une version américanisée et confuse du « Regietheater », lestée de vagues références visuelles à l’Holocauste et d’écarts importants par rapport à l’intrigue, elle nuit à l’impact musical d’une distribution illustre.
De retour sur la scène du Lyric Opera pour la première fois depuis ses captivants débuts en Wozzeck, en novembre 2015 (voir O. M. n° 114 p. 41 de février 2016), Tomasz Konieczny était attendu avec impatience. Son interprétation du Hollandais a comblé tous les espoirs. Habitant le rôle avec une intensité sombre et poignante, depuis un époustouflant « Die Frist ist um » jusqu’à l’ultime « Den fliegenden Holländer nennt man mich », le baryton-basse polonais s’affirme à la fois comme un superbe chanteur et un acteur consommé.
Dotée d’un instrument puissant et expressif, la Senta de Tamara Wilson lui apporte une réplique saisissante. Dans les ensembles, tout particulièrement, la soprano américaine s’élance vers des aigus d’un éclat étincelant, témoignant d’une palette vocale et d’un contrôle remarquables. Son incarnation très vivante est, toutefois, victime des costumes hideux d’Allen Moyer, comme cette robe de mariée blanche mal ajustée, dans la scène finale, où Erik lui tire dessus – mais oui ! – avec son fusil de chasse.
Pour sa première apparition au Lyric Opera, le ténor américain Robert Watson offre de ce dernier un portrait convaincant, dont l’impétuosité reflète son ardente obsession pour Senta, en même temps que les premiers signes de danger d’un sombre état d’esprit. En Daland, la basse finlandaise Mika Kares, évitant la caricature comique, donne un poids rafraîchissant à son personnage. Quant à Ryan Capozzo, membre du « Ryan Opera Center », le programme pour jeunes artistes du Lyric Opera, il prête au Pilote sa spontanéité.
Entamant sa troisième saison avec Enrique Mazzola comme directeur musical, le Lyric Opera Orchestra se montre solide, même si la coordination entre la fosse et le plateau n’est pas toujours optimale. La lecture du maestro manque parfois d’urgence, mais est à son meilleur dans les scènes marquées par l’influence italienne, qui se concentrent sur de belles mélodies lyriques. De ce point de vue, Der fliegende Holländer est, sans doute, un point de départ idéal vers les œuvres plus tardives de Wagner.
La parfaite préparation du Lyric Opera Chorus par Michael Black permet à ses membres de se distinguer, autant comme des personnages à part entière que grâce à leur excellence collective coutumière.
WILLIAM SCHACKELFORD