Ce sera l’unique réunion de superstars de l’art lyrique en France, cet été. Le 1er août, en soirée, France 5 diffusera le concert filmé sans public, quelques jours plus tôt, au Théâtre Antique, pour lequel Jean-Louis Grinda, directeur des Chorégies, s’est assuré le concours de Cecilia Bartoli, Karine Deshayes, Aleksandra Kurzak, Roberto Alagna, Jonas Kaufmann et Ludovic Tézier ! Accompagnés au piano par l’excellent David Zobel, ces six vedettes seront rejointes par deux espoirs de la jeune génération française, lauréats du Concours International de Chant de Clermont-Ferrand, en 2019 : la soprano Solen Mainguené, native d’Orange, et le ténor Jean Miannay.
Roberto Alagna
Quels ont été pour vous les points négatifs, mais aussi positifs, du confinement ?
Pour nous tous, cette période est dure sur le plan économique. Cet arrêt brutal a également soulevé un certain nombre de questions, sur ce qui allait advenir des plus précaires, de notre art et de notre corporation, nous solistes d’opéra. Car depuis la crise de 2008, les difficultés n’ont cessé de s’accentuer. En revanche, j’ai pu profiter de ce temps pour remettre la maison en état et jardiner. Faire la classe chaque jour à ma fille Malèna a été un bon entraînement, puisque je vais me charger de sa scolarité pour le primaire. Je ne pensais pas en être capable, mais je me suis aperçu que j’avais suffisamment de patience. Maintenant que je suis entré dans ce rôle, il me plaît assez !
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Cecilia Bartoli
Comment avez-vous vécu cette crise sanitaire ?
C’est une période vraiment terrible que nous venons de traverser. Surprenante, aussi. Parce que la pandémie, qui n’a rien, historiquement, d’un phénomène inédit, s’est propagée beaucoup plus vite que les précédentes, du fait de la globalisation. La crise nous a donc tous frappés quasiment en même temps. Et nous n’étions pas prêts pour cela. Comment se fait-il qu’en 2020, avec toute la technologie qui nous entoure, nous nous soyons retrouvés à court de masques dans les hôpitaux ? Cette situation est d’une absurdité qui m’a bouleversée !
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Karine Deshayes
Comment avez-vous traversé cette période inédite ?
Insolite, même ! Quand tout s’arrête, du jour au lendemain, alors qu’on est habitué à enchaîner les productions quasiment sans prendre de vacances, on ne peut qu’éprouver un choc. D’autant qu’on se demande forcément combien de temps pareille situation va durer, et quand la reprise aura lieu – nous n’en savons d’ailleurs toujours pas plus dans notre secteur. Mais puisque les trains vont pouvoir à nouveau faire le plein, pourquoi serait-il inconcevable de réunir quelques centaines de personnes, pendant une heure, dans une salle de spectacle ? Je suis restée confinée chez moi, à Paris. Et comme beaucoup de mes collègues, j’ai ressenti la nécessité de prendre des nouvelles, d’échanger, de se rassembler aussi. C’est grâce à cet élan qu’est née l’association « UNiSSON », avec le désir de créer un espace de dialogue, et de venir en aide à ceux que la crise a mis en grande difficulté, en défendant les droits et les intérêts de chacun.
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Ludovic Tézier
Alors que vous avez pris la plume, à plusieurs reprises, pour défendre votre art, quel a été l’impact du confinement sur votre vie personnelle ?
J’ai été surpris, moins par l’irruption de ce virus un peu inattendu et l’enchaînement des événements, que par l’hyperactivité démesurée dans les réactions qui en ont découlé. Les conséquences, tant sanitaires qu’économiques, n’ont rien d’extraordinaire. Comme dans toute grande crise – et la France a connu des moments tragiques –, la désunion s’est révélée, alors qu’elle était déjà là de manière latente. Certains disent que le confinement a sauvé le monde, d’autres affirment qu’il l’a enfoncé. L’histoire jugera. Je suis, pour ma part, très légaliste, et me suis donc enfermé à Paris avec les miens, en restreignant nos sorties. Nous avons la chance d’habiter un appartement, sinon immense, du moins très douillet, avec une très jolie fenêtre laissant entrer beaucoup de lumière, et un très pratique vélo d’appartement pliable, grâce auquel j’ai pu entretenir, non ma ligne de sylphide, qui a disparu il y a bien longtemps, mais mes jambes et mon cœur, tout en me vidant la tête. Nous avons, comme tout le monde, suivi les actualités – car, de même qu’en 1940, les gens pointaient des punaises sur les cartes de France pour voir l’invasion arriver, nous tenions à être renseignés sur la façon dont les choses évoluaient par région. Une fois que la propagation s’est stabilisée au gros tiers Nord-Est du pays, nous nous sommes un peu coupés de l’information continue. Inutile de s’intoxiquer avec ces vérités qu’on dément le lendemain, pour nous les resservir le surlendemain ! Cette crise a, en effet, donné lieu à un cirque déplorable, et assez insupportable à vivre au quotidien. L’idée n’était pas de prendre ou non de la chloroquine, mais de ne pas avoir à prendre de médicament du tout, et nous avons fait tout ce qu’il fallait pour.