Jusqu’au 19 février, le baryton-basse natif d’Ottawa participe, pour ses débuts à l’Opéra National de Paris, à la nouvelle production de Cosi fan tutte, dirigée par Philippe Jordan. L’attend ensuite, en juillet, le rôle-titre de Don Giovanni au Festival d’Aix-en-Provence.
Interview express entre deux répétitions de Cosi fan tutte, au Palais Garnier. Quarante petites minutes pour tenter de cerner le baryton-basse Philippe Sly et de relater avec fidélité son parcours et ses aspirations.
Le temps étant compté, le Canadien de 28 ans ne semble pas vouloir s’appesantir outre mesure sur des éléments biographiques. Il souhaite avant tout faire passer quelques messages. Notamment aux directeurs du casting, qui s’arrêtent à son physique de jeune premier et lui offrent des rôles en décalage avec sa tessiture.
« Certaines personnes vous voient d’une façon qui n’est pas idéale pour votre carrière, dans la mesure où leurs propositions peuvent compromettre votre santé vocale sur le long terme. Il faut donc parvenir à les convaincre que ce qui est bon pour vous est aussi bon pour eux ! Pour survivre dans le monde lyrique actuel, il est, en effet, nécessaire de se respecter soi-même. Il faut savoir dire non, connaître ses forces et ses limites. »
Fils de militaires mélomanes, devenus fans de musique classique après avoir été basés en Allemagne, le petit Philippe grandit à Ottawa, au son de Glenn Gould et de Simon & Garfunkel. Alors qu’il est encore en maternelle, il demande régulièrement à son institutrice de s’absenter de la classe pour aller aux toilettes… où il chante et teste l’acoustique du lieu !
Le virus est là, et lorsqu’il assiste au spectacle d’une chorale d’enfants, il demande à ses parents de rejoindre l’ensemble. Il a 7 ans ; il est admis dans le chœur après avoir auditionné sur un air des Misérables. Un an plus tard, ayant décelé un talent hors du commun, le chef de la formation conseille au petit garçon de prendre des cours de chant. C’est à ce moment qu’il se forme techniquement, abordant tous les styles du répertoire classique.
À la fin de l’adolescence, il intègre la McGill University de Montréal, où il fait la rencontre du baryton Sanford Sylvan. « Pour s’améliorer, un chanteur a d’abord besoin de se trouver. Sanford m’y a aidé. Il est devenu à la fois un gourou, un mentor, un coach musical et technique, ainsi qu’un ami… Ce type de passage de relais entre maître et élève, comme il peut en exister dans le monde de l’artisanat, est devenu très rare aujourd’hui. D’autant qu’il implique, pour l’enseignant, une responsabilité hors du commun. »